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mercredi 1er octobre 2008 Démocratie, laïcité des institutions et égalité des sexes : des valeurs dont l’Occident peut être fier "Démocratie et égalité des sexes", par Diane Guilbault
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Présentation du livre de Diane Guilbault Démocratie et égalité des sexes, publié aux éditions Sisyphe en octobre 2008.
Au cours des cinq dernières années, des débats sur le rôle que veulent se donner les religions dans la vie civique ont secoué l’opinion publique au Canada et au Québec. Au Canada, la demande d’un groupe radical d’instaurer des tribunaux islamiques pour juger des causes reliées au droit de la famille a déclenché un vaste mouvement de protestation dans tout le pays. Au Québec, les vives réactions suscitées par une série de dérogations aux règlements, consenties pour des motifs d’ordre religieux, et qui remettent en question l’égalité des sexes, ont incité le gouvernement à créer une commission de consultation en 2007. Les audiences de cette commission ont donné lieu à un exceptionnel exercice de démocratie. Toutefois, si les personnes invitées à s’y exprimer ont pu le faire librement, à la lecture du rapport des commissaires, MM. Gérard Bouchard et Charles Taylor, en mai dernier, on a pu constater qu’elles n’ont pas toutes été entendues avec la même objectivité ni la même empathie. Le point de vue féministe n’a pas reçu l’accueil qu’il aurait mérité étant donné que les « accommodements raisonnables » accordés au nom de croyances religieuses menaçaient d’éroder les droits des femmes. Les éditions Sisyphe ont voulu remédier à cette occultation en présentant un portrait global, incluant l’opinion féministe. Diane Guilbault nous livre ici une synthèse limpide et convaincante sur les liens complexes entre démocratie, laïcité, religion et égalité des sexes. Elle adopte une position critique objective et mesurée, après avoir d’abord défini minutieusement les concepts autour desquels s’articule sa réflexion. Elle rappelle le contexte socio-politique à l’origine de « la crise des accommodements » que les présidents de la Commission Bouchard-Taylor réduisent à une « crise des perceptions ». La chercheuse explique pourquoi les propositions du rapport de cette commission donnent une réponse inappropriée au profond malaise qu’éprouve une large partie de la société québécoise devant la contestation de ses valeurs et de règles adoptées à la suite de longs processus démocratiques, depuis quelques décennies. La question des accommodements n’a rien à voir avec l’immigration, dit Diane Guilbault, comme l’ont laissé croire les commissaires Bouchard et Taylor ; elle concerne plutôt l’adhésion d’individus à une lecture fondamentaliste et politique de leur religion. Cette lecture, associée à une interprétation des Chartes basée sur les croyances et les droits individuels ainsi que sur le multiculturalisme, conduit à l’amalgame de l’appartenance culturelle et de l’appartenance religieuse, cette dernière devenant pour plusieurs le fondement de leur identité. Une telle lecture incite à croire qu’il est légitime de réclamer des privilèges personnels au détriment des droits collectifs, notamment les droits des femmes. Dans le contexte de la mondialisation, la religion représente un facteur qui ressoude les communautés éclatées que plus rien d’autre ne rassemble, ce qui profite à tous les fondamentalismes religieux. L’argument « accommoder pour intégrer », que privilégie le rapport Bouchard-Taylor, ne convainc pas la chercheuse : une démarche d’intégration, dit-elle, ne saurait se faire au détriment des droits et des valeurs communes de la société d’accueil. Les personnes immigrantes ont aussi un rôle à jouer dans leur propre intégration, notamment en apprenant à mieux connaître la culture du milieu dans lequel elles ont choisi de vivre et en respectant les valeurs démocratiques. Une partie de la gauche québécoise et féministe associe la critique des accommodements, dispensés fort libéralement au nom de croyances religieuses, à une attitude fermée à « la différence », ce qui limiterait la réflexion. Au contraire, explique l’auteure de Démocratie et égalité des sexes, il faut mener plus avant une réflexion critique et un véritable débat sur la pertinence de ces accommodements. Diane Guilbault ne se contente pas d’exposer les problèmes et d’analyser les diverses réponses proposées. Elle avance des solutions pour améliorer les conditions du vivre-ensemble de manière à ce que soient respectés, à la fois la liberté religieuse des uns, et les droits et les valeurs qui obtiennent une large adhésion au sein de la société québécoise. Une déclaration officielle de laïcité par l’Assemblée nationale et la déjudiciarisation du religieux guideraient les institutions publiques afin qu’elles apportent des réponses plus appropriées aux demandes d’exemptions qui menacent les droits. Devant celles et ceux qui relativisent la question des droits des femmes en invoquant le respect des cultures et de la liberté religieuse – et, parfois, la nécessité de lutter contre l’impérialisme occidental qui impose ses valeurs –, Diane Guilbault reconnaît que le bilan de l’Occident est loin d’être parfait. Mais il compte à son actif des valeurs qu’il faut revendiquer et défendre avec fierté : la démocratie, la séparation de la religion et de l’État, ainsi que l’égalité des sexes. L’émancipation des femmes a certes entraîné des changements sociaux majeurs, écrit l’auteure, mais le sexisme existe toujours, perpétué par les discours des fondamentalistes religieux et des groupes conservateurs. Tout autant que la défense du français, il faut que la lutte pour l’égalité des femmes demeure une priorité au Québec. Rappelant que, partout au monde, des femmes refusent d’abdiquer leur liberté et que certaines le paient de leur vie, Diane Guilbault ajoute : « Pour conserver leurs acquis, les femmes doivent poursuivre leur combat en gardant en tête l’objectif fondamental du féminisme : l’émancipation de toutes les femmes. Il faut reconnaître que certaines règles religieuses sont discriminatoires […]. Appuyer les femmes qui les revendiquent pour toutes sortes de raisons ne peut être une position féministe. Au contraire : chaque fois que ces mesures discriminatoires reçoivent un appui, toutes celles qui luttent contre le sexisme à l’intérieur de leur communauté y perdent au change. » La société a un devoir d’éducation et de protection des valeurs démocratiques, conclut l’auteure de Démocratie et égalité des sexes car, s’il est vrai que l’ignorance nourrit l’intolérance, il est aussi vrai que la tolérance découle parfois de l’ignorance. Diane Guilbault a une formation en sociologie et en journalisme. Elle a travaillé en organisation communautaire et dans divers organismes de défense des droits, comme la Commission des droits de la jeunesse et le Conseil du statut de la femme, pour lequel elle a rédigé, notamment, « Les femmes âgées du Québec » (1999) et « Les femmes immigrées du Québec » (2005). Elle a fait du bénévolat pendant plusieurs années dans divers organismes communautaires dans les domaines scolaire, municipal et sportif. Diane Guilbault s’intéresse à la politique en tant qu’outil du mieux-vivre ensemble. Démocratie et égalité des sexes s’inscrit donc dans son engagement citoyen. Articles sur ce livre :
En Europe. Demandez à votre libraire de s’adresser à notre distributeur : Mis en ligne sur Sisyphe, le 17 septembre 2008 |