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vendredi 17 février 2012


Lettre ouverte et pétition adressées à Human Rights Watch
Soutenez la séparation de la religion et de l’État, non l’islam politique

par Secularism is a Women’s Issue






Écrits d'Élaine Audet



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Cette lettre ouverte exprime clairement qu’à part les mouvements de femmes, les mouvements sociaux de la société civile et les dirigeants des pays n’en ont rien à cirer de ce qui arrive aux femmes. Les femmes sont invisibles pour ne pas dire inexistantes, sauf dans de belles intentions rhétoriques qui ne sont simplement pas mises en application. (Note de la traductrice, Édith Rubinstein, de Femmes en noir.)

Cher Kenneth Roth,
Human Rights Watch

Dans votre introduction pour le rapport mondial 2012 de Human Rights Watch - Il est temps d’abandonner les autocrates et d’adopter les droits -, vous insistez pour qu’on soutienne les gouvernements nouvellement élus qui ont amené au pouvoir les Frères musulmans en Tunisie et en Égypte. Dans votre désir “d’engagement constructif” avec les nouveaux gouvernements, vous demandez aux États de cesser de soutenir les autocrates. Mais vous n’êtes pas un État ; vous êtes à la tête d’une organisation internationale de droits humains dont le rôle est de dénoncer les violations de droits humains, une tâche honorable et nécessaire que votre texte néglige en grande partie.

Vous dites : “Il est important d’entretenir les éléments respectant les droits de l’Islam politique tout en restant fermement contre la répression en son nom”, mais vous vous abstenez de citer la garantie la plus fondamentale pour les droits – la séparation de la religion et de l’État. Des bandes de salafistes ont frappé à coups de canne des femmes dans des cafés tunisiens et des magasins égyptiens ; ont attaqué des églises en Égypte ; se sont emparé de villages entiers en Tunisie et ont fermé pour deux mois l’Université Manouba dans le but d’exercer une pression sociale sur le port du voile. Et alors que les “Musulmans modérés” disent qu’ils protégeront les droits des femmes (si pas des gays), ils ont fait très peu pour maîtriser ces bandes.

Vous, pourtant, vous êtes si peu concernés par les droits des femmes, des gays et des minorités religieuses que vous ne les mentionnez qu’une seule fois comme suit : “Beaucoup de partis islamiques ont, en effet, adopté des positions embarrassantes qui assujettiraient les droits des femmes et réduiraient leurs libertés religieuses, personnelles et politiques. Mais il en a été de même pour beaucoup de régimes autocratiques que l’Occident soutient”. Allons-nous vraiment mettre la barre si bas ? Ceci est la voix de quelqu’un qui présente des excuses, pas celle d’un défenseur éminent des droits humains.

Vous ne signalez pas non plus une des menaces les plus claires aux droits – en particulier pour les femmes et les minorités religieuses et sexuelles – la menace d’introduire le “ droit de la Charia ”. Il n’est simplement pas suffisant de dire qu’on ne sait pas quelle sorte de droit islamique, si c’est le cas, en résultera, quand il est déjà évident que la liberté d’expression et la liberté de religion – sans mentionner le choix de ne pas porter de voile – sont menacées. Et alors qu’il est vrai que les Frères musulmans n’ont pas été au pouvoir pendant très longtemps, on peut avoir quelques idées de ce qu’on peut attendre en examinant leurs antécédents. Au Royaume-Uni, où ils ont été exilés pendant des décennies, sans être entravés par une persécution politique, des exigences gouvernementales ou des revendications de la pression populaire, les Frères musulmans ont systématiquement encouragé l’apartheid des genres et des systèmes légaux parallèles contenant la version la plus régressive de la Charia Yusef al-Qaradawi, un intellectuel influent qui y était associé maintient publiquement que l’homosexualité devrait être puni de la peine de mort. Ils ont soutenu la négation de l’holocauste et du génocide au Bangladesh de 1971, et ont partagé des plateformes avec des jihadis-salafistes répandant leurs appels pour un jihad militant. Mais plutôt que d’examiner l’action des fondamentalistes musulmans en Occident, vous continuez à réclamer que les gouvernements occidentaux “s’engagent”.

Les gouvernements occidentaux sont déjà engagés ; si le soutien des autocrates était leur Plan A, les Frères musulmans ont été longtemps leur Plan B. L’implication de la CIA avec les frères musulmans remonte aux années 1950 et a été ravivée sous l’administration Bush, tandis que le soutien à la fois des Frères musulmans et de Jamaat e Islaami a été crucial pour la “douce stratégie anti-terreur” de l’État britannique. Avez-vous entendu les phrases “extrémisme non violent” ou “islamisme modéré” ? Ce langage est déployé pour modérer les mouvements qui auraient remplacé les bombes par des élections comme moyen d’arriver au pouvoir mais restent encore engagés dans la discrimination systématique.

Comme vous, nous soutenons le démantèlement de l’état d’urgence et promouvons la règle de la loi. Mais nous ne voyons pas qu’une série de structures autocratiques devrait être remplacée par une autre qui fait appel à la sanction divine. Et alors que le renversement des gouvernements répressifs a été une victoire et que des élections libres sont en principe un pas vers la démocratie, le dirigeant d’une organisation majeure de droits humains ne devrait-il pas soutenir les appels populaires pour empêcher un contrecoup et pour sauvegarder les droits fondamentaux ? En d’autres mots, au lieu de plaider pour un soutien stratégique de partis qui peuvent utiliser les élections pour mettre un terme à l’appel de continuer le changement et pour attaquer les droits élémentaires, ne devriez-vous pas soutenir les voix qui parlent à la fois de liberté et d’égalité qui prétendent que les révolutions doivent continuer ?

Dans l’ensemble de votre texte, vous vous centrez uniquement sur les aspects politiques traditionnels du programme des droits humains. Vous dites, par exemple, que ”les insurrections arabes ont été inspirées par une vision de la liberté, un désir d’avoir une voix dans sa propre destinée, et une quête pour des gouvernements responsables vis-à-vis du public plutôt que captifs d’une élite régnante.” Cela est vrai jusqu’ici, mais vous ignorez complètement le rôle que les revendications économiques et sociales ont joué dans les insurrections. Vous semblez n’être capable d’entendre que les voix de l’aile droite – les politiciens islamistes – et pas les voix des gens qui ont initié et soutenu ces révolutions : les chômeurs et les pauvres de Tunisie, cherchant des moyens de survivre ; les milliers de femmes égyptiennes qui se sont mobilisées contre les forces de sécurité qui leur arrachaient les vêtements et les soumettaient à des agressions sexuelles connues, comme des “tests de virginité”. Ces agressions sont une forme de torture d’État, habituellement une question centrale pour les organisations de droits humains, pourtant, elles vous ont échappé parce qu’elles étaient commises contre les femmes.

La manière dont vous avez ignoré les droits sociaux et économiques fait partie de la négligence dont vous faites preuve à l’égard des femmes, des droits sexuels et des minorités religieuses. Votre vision est encore ancrée dans la période antérieure à la Conférence de Vienne et les grandes avancées qu’elle a réalisées en tenant pour responsables des acteurs non étatiques et en considérant les droits des femmes comme des droits humains. Votre texte n’exprime que trop clairement que, alors que des chercheurs, des militant-es et des spécialistes de pays qui sont les bras et les jambes et le corps de Human Rights Watch défendent les droits des femmes, des minorités et des pauvres, la tête de leur organisation est principalement intéressée par la relation entre États.

Organisations :

. Le Conseil canadien des femmes musulmanes (CCMW)
. Le Centre pour un espace laïc, mondial
. Marea, Italie
. Nijeri Khori, Bangladesh
. Une loi pour tous, RU
. Organisation contre la discrimination contre les femmes en Iran, RU
. La Laïcité est une question-femmes (SIAVI), mondial
. Southall Black Sisters, RU
. Initiative de femmes pour une citoyenneté et des droits universels (WICUR), mondial
. Les Femmes vivant sous le droit musulman (WLUML), mondial

Personnes (organisations citées uniquement dans un but d’identification)

. Dorothy Aken’Ova, Directrice Exécutive, INCRESE, Nigeria
. Codou Bop, Coordinatrice du Groupe de Recherche sur les femmes et, le droit, Sénégal
. Ariane Brunet, Co-Fondatrice, du Fonds d’Action Urgente, Canada
. Lalia Ducos, WICUR- Initiative de femmes pour une citoyenneté et des droits universels
. Laura Giudetti, Marea, Italie
. Asma Guefi, Présidente, Ni Putes Ni Soumises, France
. Anissa Helie, Professeure associée au John Jay College, US
. Marieme Helie Lucas, La Laïcité est une question-femmes
. Alia Hogben, Conseil canadien des femmes musulmanes
. Hameeda Hossain, Bangladesh
. Khushi Kabir, Nijera Kori, Bangladesh
. Frances Kissling, Conférencière au Centre de bioéthque de l’Université de Pennsylvanie
. Maryam Namazie, Une loi pour tous, Organisation contre la discrimination contre les femmes en Iran, RU
. Pragna Patel, Southall Black Sisters, UK
. Gita Sahgal, Centre pour un espace laïc, UK
. Fatou Sow, Les Femmes vivant sous le droit musulman (WLUML)
. Meredith Tax, Centre pour un espace laïc, USA
. Faizun Zackariya, Cofondatrice de Recherche des femmes musulmanes et Front d’action (MWRAF), Sri Lanka
. Afiya Zia, Journaliste, Pakistan

Texte de la pétition à signer en ligne à cette page.

Déclaration

Dans une lettre ouverte à Kenneth Roth (voir ci-dessus), nous nous inquiétons vivement que le Directeur de Human Rights Watch se serve de son essai introductif au Rapport mondial 2012 de Human Right Watch (Time to Abandon the Autocrats and Embrace Rights) pour exhorter à soutenir les gouvernements de la droite islamique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. Notre lettre souligne qu’il n’est pas nécessaire d’exhorter à s’engager là où il n’y a pas de menace de boycott, qu’il se fait l’écho de discours sécuritaires affairant aux contextes musulmans où le choix porte entre des ‘autocrates’ et des ‘Islamistes modérés’ ; qu’il est indifférent aux menaces sur les droits sexuels et contre les minorités religieuses ; qu’il passe sous silence les luttes des travailleurs, des laïcs et des gens qui ont initié et soutenu les mobilisations et les mouvements contre les régimes despotiques.
Ayant fait l’expérience des manières dont les intégristes religieux ont utilisé, à la fois la violence armée et le pouvoir de l’État pour saper les libertés fondamentales, nous tenons à exprimer notre inquiétude face à la montée des confréries musulmanes et d’autres représentants de l’islam politique. Nous croyons que la laïcité est une condition minimale de la liberté et de l’égalité de tous les citoyens et citoyennes. Elle est essentielle à la démocratie et à la réalisation pleine des droits humains.

Plutôt que de devenir complice d’intégristes religieux au pouvoir, nous demandons à Human Rights Watch de rapporter les violations et les menaces contre les personnes ciblées par les fondamentalistes et de soutenir l’appel pour la laïcité et la lutte continue pour la justice sociale.

Pour signer cette pétition.

Vendredi, le 10 février 2012 par SIAWI

Mis en ligne sur Sisyphe, le 15 février 2012



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