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samedi 6 octobre 2012 L’innocence de l’Occident ou la liberté d’expression menacée
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Voilà plus de dix ans que l’Organisation de la Coopération islamique (OCI), basée en Arabie saoudite et regroupant 57 pays musulmans, présente chaque année des résolutions devant la commission des droits de l’homme de l’ONU pour faire reconnaître le concept de « diffamation des religions », dans le but exprès de criminaliser le blasphème et de l’inscrire dans le droit international. Ce combat juridique attaque de front la liberté d’expression, reconnue partout en Occident comme étant un droit constitutionnel, un droit fondamental qui est au coeur de toute démocratie. C’est ce droit que l’OCI s’acharne à détruire depuis tant d’années, ce droit issu du combat des Lumières et fièrement proclamé dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948. Bien que l’OCI n’ait, jusqu’à ce jour, pas réussi à faire de la diffamation des religions une norme juridique internationale, elle est tout de même parvenue à imposer sa rhétorique aux pays non musulmans, définissant ainsi les contours d’une rectitude politique qui plombe démesurément le discours dominant de nos élites occidentales. C’est d’ailleurs en alléguant que la liberté d’expression ne peut servir de prétexte pour insulter les religions, et en assimilant les critiques de celles-ci à du racisme, que le terme « islamophobie » a été consacré comme étant la forme extrême du racisme contemporain, à la Conférence onusienne contre le racisme qui s’est tenue en 2001, à Durban, en Afrique du Sud. Une minorité de musulmans, vraiment ! Les médias insistent beaucoup pour nous convaincre que ces manifestations et ces émeutes sont le fait d’une minorité de musulmans tout en prenant bien soin de taire la vaste offensive politique des dirigeants arabes et musulmans qui se prépare à l’ONU pour internationaliser une loi anti-blasphème. Pendant que l’Égypte et la Turquie songent à légiférer sur le blasphème dans leur propre pays, la Secrétaire générale de la Ligue arabe, Nabil al-Araby, a déclaré que la Ligue, ainsi que l’Organisation de la Coopération islamique, l’Union européenne et l’Union africaine sont sur le point d’élaborer une Convention internationale pénalisant le blasphème et les insultes aux figures religieuses. D’ailleurs, si les dirigeants de ces pays ont appelé leur population au calme, c’est justement pour ne pas compromettre leur offensive à l’ONU. Cette fois-ci, les planètes sont bien alignées. Le printemps arabe, ayant mis au pouvoir des islamistes, va donner à ce jihad juridique, mené par l’OCI depuis tant d’années, les leviers politiques qui lui manquaient pour faire pression sur les pays occidentaux dans le but d’imposer une loi anti-blasphème. Voilà les véritables fruits du printemps arabe, ce printemps dont on attendait la démocratie et la laïcité, et qui se révèle plutôt comme une formidable avancée de l’islamisme par la voie légale et démocratique. Jihad juridique Considérant la Déclaration des droits de l’homme de 1948 impie puisqu’elle ignore la Loi divine, les États membres de l’OCI, réunis au Caire en août 1990, ont adopté une Déclaration des droits de l’homme en Islam (communément appelée Déclaration du Caire) qui ne reconnaît comme légitime que les droits et libertés qui sont conformes à la Charia. Faisons un rapide survol de cette Déclaration peu banale. Article 1a) « Tous les êtres humains constituent une même famille dont les membres sont unis par leur soumission à Dieu et leur appartenance à la postérité d’Adam.... » art.1b) « Les hommes sont tous sujets de Dieu.... » Ce premier article fait de l’humanité entière des musulmans, proscrit la liberté de conscience et le droit à l’apostasie, en plus d’exclure l’athéisme. Avouez qu’on s’éloigne quelque peu des Lumières... Concernant le droit à la liberté d’expression, l’article 22a) mentionne : « Tout homme a le droit d’exprimer librement son opinion pourvu qu’elle ne soit pas en contradiction avec les principes de la Charria ». Autrement dit, vous pouvez parler de la pluie et du beau temps mais vous n’avez pas la liberté de critiquer l’islam, de défendre la liberté de conscience, l’apostasie et l’athéisme. Et surtout, ne ridiculisez pas le Prophète ! Ce serait blasphémer. Au Pakistan et en Arabie saoudite, cela vous rend passible de la peine de mort. En février dernier, un journaliste, Hamza Kashgari, 23 ans, s’enfuit d’Arabie saoudite vers La Nouvelle-Zélande, après avoir fait des commentaires sur Twitter au sujet de Mahomet. Il sera arrêté par des agents saoudiens à l’aéroport de Kuala Lumpur en Indonésie pour être ramené en Arabie saoudite, où il doit faire face à des accusations de blasphème. Il pourrait être exécuté. Alors c’est qui, pensez-vous, le prochain twitt qui va twetter sur Mahomet ? Mais continuons, article 22c) « L’information est un principe vital pour la société. Il est prohibé de l’utiliser ou de l’exploiter pour porter atteinte au sacré et à la dignité des prophètes ou à des fins pouvant nuire aux valeurs morales et susceptibles d’exposer la société à la désunion, à la désintégration ou à l’affaiblissement de la foi ». Limiter la liberté de presse en muselant les journalistes et les intellectuels qui seraient tentés de critiquer l’islam. En plus politiquement correct, cela veut dire « responsabiliser les médias ». C’est d’ailleurs une phrase que l’on a beaucoup entendue à Radio-Canada ces dernières semaines. Et finalement, la grosse cerise rouge sur le sundae blanc, l’article 24, disant que « Tous les droits et libertés énoncés dans la présente Déclaration sont soumis aux dispositions de la Charria ». Je vous rappelle que cette Déclaration a été signée par 57 pays musulmans. Alors, à quoi pourrait servir d’internationaliser une loi anti-blasphème, pensez-vous ? Première étape : Contrer l’expansion du christianisme en empêchant le prosélytisme des chrétiens engagés oeuvrant dans des pays majoritairement musulmans et faire fuir les minorités chrétiennes persécutées, libérant ainsi les terres musulmanes de la présence des non-musulmans. Pour que du Maroc à l’Indonésie soit éliminé toutes influences religieuses étrangères. Ce n’est pas sans raison que le Pape, lors de sa récente visite au Liban, a exhorté les chrétiens à ne pas quitter leur pays. Seconde étape : Attaquer la liberté d’expression pour interdire toute critique de l’islam, y compris dans les pays occidentaux. Critiquer l’islam serait alors considéré comme une incitation à la haine des musulmans. En imposant une telle rectitude aux journalistes et aux intellectuels, on inocule la peur et contrôle à distance le message de ceux qui façonnent l’opinion publique. C’est bien connu qu’en politique, l’information est le nerf de la guerre. Dites-vous bien que si la liberté d’expression est actuellement attaquée et malmenée, ce n’est pas parce qu’un mauvais film a ridiculisé le Prophète (étonnamment, personne n’a demandé quel âge avait Aïcha, la plus jeune épouse du Prophète...), mais bien parce que le contrôle de l’information en Occident comme dans les pays musulmans est, pour les islamistes, un enjeu politique d’une importance colossale. Pour les Occidentaux, ce film est un navet comme tant d’autres, mais pour les islamistes, c’est un cadeau tombé du ciel ! Avec cela, ils vont se rendre à l’ONU, en jouant les victimes, pendant qu’en Occident, des têtes sont mises à prix et que la liberté d’expression se déplace sous escorte policière. Certains se veulent rassurants en prétendant qu’une loi anti-blasphème n’aurait qu’une portée symbolique puisqu’elle ne serait pas légalement contraignante. Une telle naïveté est déconcertante quand on sait que, le 26 septembre, l’agence Reuters rapportait que la Cour d’État à Sao Paulo a rendu un jugement, suite à une plainte de la National Islamic Union (un groupe de musulmans brésiliens) contre YouTube, dans lequel elle ordonne à ce dernier de retirer le film controversé de son site web, d’ici 10 jours. Le juge Miranda a même conclu son jugement en disant : « Lorsque la liberté d’expression se juxtapose avec le besoin de protéger des individus ou des groupes d’individus d’une action pouvant inciter à la discrimination religieuse, il faut alors bannir cette expression comme une chose illégale, sans que cela puisse offenser la liberté d’expression. » Une loi anti-blasphème aurait une portée politique indéniable en ce qu’elle est une étape nécessaire pour les islamistes dans leur volonté d’imposer la charia partout dans le monde. Et ces objectifs sont en tous points conformes à ceux des Frères musulmans. Jihad médiatique En mars 2008, profitant d’un don de cent millions de dollars de la reine Noor de Jordanie pour un fonds à destination des médias visant à contrer les représentations stéréotypées de l’islam, la chaîne satellitaire Al-Jezira annonce qu’elle ouvre un grand Centre des droits de l’homme et des médias (DCMF) à Doha, au Qatar. Au même moment, un contrat de partenariat sera signé avec Reporters sans frontières pour éduquer à la « responsabilisation des médias ». Le 19 juin 2008, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU annonce que la responsabilisation des médias contre la diffamation pour prévenir les crises liées aux représentations stéréotypées de l’islam fera partie du plan d’action pour l’année à venir. Relisez l’article 22c de la Déclaration des droits de l’homme en Islam. On y est presque. Maintenant. quel est le point de vue du Centre des médias de Doha sur les évènements récents entourant le film « L’Innocence des musulmans » ? On condamne, disent-ils, la violence causée par le film mais on demande aussi à ce que les auteurs du film soient punis. « La liberté d’expression est un droit fondamental qui doit être protégé en tout temps. Cependant, avec le droit à l’expression viennent certaines responsabilités et nous croyons qu’une expression ayant pour but d’inciter à la haine, pouvant conduire à des pertes de vie ou à des actes violents, doit être criminalisée ». Désormais, il suffira d’assassiner un ambassadeur ou quelques dizaines de personnes ou encore de mettre à prix la tête d’un réalisateur, d’un écrivain, d’un traducteur, d’un journaliste ou d’un dessinateur pour que l’ensemble des médias protège... le Prophète. Allah est grand ! De plus en plus, d’ailleurs. Il est même ici au Québec, alors que le 14 septembre dernier, le président du Conseil musulman de Montréal, Salam Elmenyawi, a émis un communiqué condamnant le film et les réactions violentes, dans lequel il appelle « tous les pays à travers le monde à lutter contre la diffamation de la religion et à protéger les religions contre de tels discours haineux. Ces lois, dit-il, doivent également limiter ceux qui cherchent exclusivement à offenser les sentiments religieux, semer la discorde et créer la haine contre les personnes d’autres confessions. » Le 18 septembre, à l’émission 24/60 de Radio-Canada, Haroun Bouazzi, président de l’Association des musulmans pour la laïcité, déclare à propos des caricatures publiées dans Charlie Hebdo qu’elles sont une véritable provocation envers les musulmans, que cela participe à l’islamophobie, au racisme et au colonialisme alors que les médias ont une responsabilité. Ouf ! Heureusement qu’il est pour la laïcité, celui-là... Le dialogue interreligieux pour censurer le droit à la liberté d’expression Le 7 septembre 2011, Montréal a été l’hôte de la deuxième conférence mondiale des religions organisée par l’Université McGill et l’Université de Montréal. Parmi les invités les plus connus se trouvaient le Dalaï Lama, Tariq Ramadan et Gregory Baum. Cette conférence avait pour but de discuter d’une Déclaration universelle des droits de la personne par les religions du monde qui accorderait aux religions le droit de ne pas être dénigrées par les médias et le milieu académique. À l’article 12.4 de cette Déclaration, on peut y lire que « Chacun a le droit que sa religion ne soit pas dénigrée dans les médias ou dans les maisons d’enseignement ». Puis en 12.5 : « Il est du devoir de l’adepte de chaque religion de s’assurer qu’aucune religion n’est dénigrée dans les médias ou dans les maisons d’enseignement ». Relisez encore une fois, l’article 22c) de la Déclaration des droits de l’homme en Islam et vous verrez, que cette fois-ci, on y est ! Des universitaires, religieux bien sûr, qui demandent de censurer les médias et le milieu académique. On croit rêver ! Et ce n’est pas tout. À la fin de cette Déclaration, il est écrit : « Ce document vise à reformuler la Déclaration universelle des droits de l’homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations-Unies le 10 décembre 1948. L’initiative de ce document de travail s’est concrétisée lors de la finalisation des plans d’une Conférence mondiale qui a eu lieu à Montréal, du 7 au 9 décembre 1998, afin de commémorer le cinquantième anniversaire de la Déclaration universelle des Nations Unies. C’est un fait connu, la Déclaration des Nations Unies a été largement critiquée, [qualifiée] d’« occidentale », critique qui tire son origine de l’impression que, lorsque de tels efforts viennent de l’Occident, ils sont une prolongation de l’impérialisme, c’est-à-dire, un effort continu de la part de l’hémisphère occidental d’imposer ses propres valeurs au reste du monde en vue de déguiser l’universalisme. En conséquence, la faculté des Études religieuses de l’Université McGill s’est adressée au groupe qui parraine la conférence en lui proposant d’inclure le document de travail d’une Déclaration universelle des droits de la personne par les religions du monde dans le programme du congrès. La réaction fut positive et un document de travail a été préparé au nom de la faculté ; il a été proposé dans les deux langues lors de la conférence. » Nier l’universalisme des droits et reformuler la Déclaration des droits de l’homme de 1948, jugée colonialiste et impérialiste. Mort à l’Amérique ! On croirait entendre l’Organisation de la Coopération islamique. Patrice Brodeur, professeur à l’Université de Montréal et responsable de la Chaire de recherche du Canada sur l’Islam, le pluralisme et la globalisation, a même qualifié cette Déclaration « d’innovatrice en ce qu’elle montre comment on peut ajouter à la Déclaration universelle de 1948 des perspectives qui peuvent enrichir notre compréhension des droits de la personne aujourd’hui. C’est, précise-t-il, une déclaration qu’il faut lire en complémentarité et non en opposition de celle de 1948 ». Innovatrice et complémentaire, vraiment ? Si l’article 12 de cette Déclaration était appliqué, cela ouvrirait la porte aux poursuites judiciaires pour blasphème tout en mettant les religions à l’abri de toutes critiques, sans compter que les médias et le milieu académique seraient alors sous haute surveillance. Cette Déclaration de protection des religions prohibe le droit à la liberté d’expression et contredit manifestement celle de 1948. De plus, elle s’inscrit parfaitement dans le prolongement de la Déclaration des droits de l’homme en Islam et des pressions incessantes de l’OCI pour criminaliser le blasphème. Remplacer les Droits de l’homme par la Charia Le 11 septembre 2001, suite aux attaques terroristes, les tours jumelles du World Trade Center s’effondraient, tuant des milliers de civils et frappant le coeur financier de l’Amérique. Onze ans plus tard, jour pour jour, l’ambassadeur américain en Libye, Chris Stevens est assassiné avec trois autres fonctionnaires. Le même jour, un film d’un extraordinaire kitsch, présentant Mahomet sous un jour peu flatteur, est diffusé dans sa version arabe sur Internet. Se sentant insulté, le monde musulman va s’enflammer. Des milliers de musulmans descendent dans la rue, faisant plusieurs dizaines de morts, en scandant « Mort à l’Amérique ! » Deux semaines plus tard, les ministres des Affaires étrangères des 57 pays membres de l’Organisation de la Coopération islamique (une minorité !) demandent aux Nations Unies d’adopter des lois afin de contrer la haine religieuse parce qu’ils jugent que le film L’Innocence des musulmans et les caricatures de Charlie Hebdo « contreviennent à la liberté de culte et de croyance garantie par les textes internationaux sur les droits de l’homme ». L’objectif ultime de ce jihad juridique ? Remplacer les Droits de l’homme par des droits qui sont conformes à la Charia. Une attaque astucieuse et sournoise, comparable à celle de 2001, mais frappant, cette fois-ci, le coeur politique de nos démocraties ; celui du droit inaliénable à la liberté d’expression. Tout le monde en parle, ou presque... Alors que cette liberté d’expression est gravement menacée, la nouvelle députée de Québec solidaire, Françoise David, affirme à l’émission “Tout le monde en parle”, du 22 septembre dernier, devant des millions de téléspectateurs « qu’on n’aurait pas de mérite à vivre ensemble si on était tous pareils ». Et Rachida Azdouz d’ajouter : « Ben oui, ce serait comme de se regarder dans le miroir ». Comme c’est « cute » !!! Article reproduit avec l’autorisation de l’auteure. – a href=”http://louisemailloux.wordpress.com/2012/09/30/linnocence-de-loccident/”target=”blank”>Le blogue de Louise Mailloux. Mis en ligne sur Sisyphe, le 2 octobre 2012 |