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jeudi 27 mars 2014

Pauline Marois n’est pourtant pas le diable incarné

par Sylvie Bergeron, auteure, éditrice, coach, conférencière






Écrits d'Élaine Audet



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Il y a eu la tentative d’assassinat politique à l’endroit de Pauline Marois, le 4 septembre 2012. Personne n’a cru bon relever le drame. Cette réalité banalisée a encouragé d’autres menaces de mort envers la première ministre, en 2013, par des anglophones. Pourquoi étouffons-nous des histoires aussi graves qui auraient été pointées du doigt à gros trait et condamnées très sévèrement si elles étaient survenues du côté anglophone ?

Cette semaine encore à Trois-Rivières, on s’en prenait à la vie de madame Marois. Et comme si ce n’était pas assez, les gens d’affaires de la Chambre de commerce (!) l’ont huée lors de la conférence d’Hillary Clinton. Cette classe dite élitique devrait avoir honte d’un comportement si tribal. On peut ne pas aimer une personne politique, mais que des membres de la supposée distinguée Chambre de commerce dénigrent notre première ministre, de surcroît devant une autre grande dame, relève de l’indécence, d’une immaturité, d’une disgrâce de l’esprit, d’un manque de savoir-vivre qui ne sied pas à une classe économique qui prétend représenter ce que nous avons de meilleur.

Peut-on mentionner sans se tromper que la haine et le manque de respect à l’endroit de notre première ministre sortante est admise, voire cautionnée, du fait qu’elle est une femme ? Cette hargne irrationnelle n’est pas dénoncée, est-ce parce qu’elle est considérée normale ?

Et plus récemment, Philippe Couillard, aspirant à l’honorable titre de premier ministre, agresse notre première sortante à coup de menaces pugnaces, comme si la vengeance lui tenaillait le ventre alors qu’il s’agit d’une simple campagne électorale : « Elle va y goûter !! », a-t-il vilipendé. M. Couillard en aurait-il dit autant devant un homme ?

Les agressions persistantes faites par des hommes à l’égard de cette femme courageuse, compétente et expérimentée sont constamment banalisées. Pourquoi les féministes sont-elles muettes ? Pourquoi les hommes ne se rappellent-ils pas à l’ordre entre eux ? Pourquoi les bien-pensants de la gauche, ceux qui ont tant de compassion pour les femmes voilées, regardent-ils ailleurs quand Madame Marois reçoit des menaces de mort à répétition par des Anglo-Montréalais et autres fanatiques ? On peut ne pas être d’accord avec ses choix, mais la détester au point de vouloir la tuer, ce n’est pas normal. Sommes-nous mal vus de vouloir dénoncer la réalité ?

Quelle femme voudra prendre le pouvoir ?

Ces agressions envers Pauline Marois ne sont pas anodines surtout parce qu’elles sont fréquentes. Et elles devraient être prises au sérieux par toute la population. Au nom du respect envers toutes les femmes, la population en entier devrait s’indigner de voir la PM subir autant d’agressions. Quelle femme aura envie de se destiner à ces hautes fonctions devant ce portrait pitoyable d’agressions ? Aucune ! On croirait presque à une conspiration mâle pour décourager les femmes à aspirer aux sphères élevées du pouvoir.

Et quel signal envoyons-nous aux hommes ? Que toute femme qui ne pense pas comme eux mérite le plus naturellement du monde la lapidation publique comme au Moyen-Âge ? Certains accusent les fanatiques religieux de discriminer et de maltraiter les femmes. Les anti-péquistes sont devenus aussi irrationnels et fanatiques que les intégristes religieux. Leur hargne n’a jamais atteint autant de sans-gêne. Cette liberté d’expression à saveur criminelle est totalement encouragée par certains médias anglophones qui ne relèvent jamais les menaces et méfaits subis par la première ministre.

Pourquoi cet acharnement à étouffer les menaces de mort dont Madame Marois fait l’objet régulièrement ? Et pourquoi ne punit-on pas ces écarts envers elle ? Jamais dans l’histoire de notre élite politique nous n’avons vu une femme subir autant d’assauts.

Et c’est sans compter le nombre sidérant de coups de couteau dans le dos que Pauline Marois a reçus par sa propre équipe. Ni le nombre de fois où « les belles-mères » du parti ont méprisé sa manière « femme » de diriger le PQ.

Elle est très forte, Pauline Marois. Comme toutes les femmes qui se présentent au parti québécois et qui portent le poids de défendre une charte et une langue dans un monde de plus en plus opportuniste et déconnecté des affaires de la nation. Les fédéralistes utilisent la réforme de notre Charte des valeurs comme un épouvantail pour diviser. Cette charte traite pourtant de la complexe réhabilitation du pouvoir féminin dans le monde, conséquemment elle effraie une frange d’hommes.

Et comme le hasard fait bien les choses, il nous amène, en pleine campagne électorale, le très passionné, anti-femme et fanatique Tariq Ramadan. Il viendra stimuler à Montréal la fibre de mâles musulmans exaltés, convaincus que la place de la femme est à l’ombre de l’homme ou de son voile. On pourra diaboliser l’émancipation de la femme, intimider davantage les pro-charte musulmans au nom de l’ouverture sur le monde et du droit au travail. De quoi rassurer la sécurité policière autour de Pauline Marois... Et qui sait maintenant si ses candidates maghrébines ne subiront pas les mêmes menaces de mort. Madame Djemila Benhabib n’est-elle d’ailleurs pas déjà dans la mire ?

La division n’est pas le fruit du hasard, mais de l’intimidation

Les hommes auraient pourtant avantage à s’ouvrir à la manière des femmes. Eux qui en plusieurs millénaires n’ont réussi qu’à produire de la guerre, de la dévitalisation, de la polarisation et donc de la destruction.

L’homme aurait avantage à prendre la mesure de son propre échec à construire un monde stable et serein. Son goût marqué pour la puissance se traduit démesurément par un ego cupide ou orgueilleux. Le fait que tant des hommes d’affaires que le pouvoir anglais et le pouvoir religieux s’acharnent aujourd’hui, avec une hystérie mal camouflée, sur Madame Marois comme si elle était le diable incarné, illustre que les femmes sont toujours des cibles faciles parce que la culture le permet. Cet acte de violence est non seulement admis, mais il est encouragé.

Pourquoi haïr à ce point une femme sinon peut-être parce qu’on cherche à déporter sa propre incompétence sur elle ? L’homme n’a démontré que peu d’aptitude à générer de l’harmonie pour rassembler les contraires. Qui a ramené le consensus jamais trouvé au Parti québécois ? Madame Marois.
Je convie tous les hommes et toutes les femmes du Québec à dénoncer la violence faite aux femmes, peu importe le poste qu’elles occupent, à dénoncer la facilité qu’ont certains hommes à mépriser la femme de façon totalement irrationnelle.

J’invite tous les hommes et les femmes à se rappeler que nous sommes avant tout des êtres humains en apprentissage d’humanité et que nous n’avons pas le droit de tuer, de menacer, d’agresser une femme au nom d’une cause, quelle qu’elle soit.

Les intimidateurs doivent dorénavant retrouver la raison et laisser la majorité silencieuse sortir de la torpeur qu’ils ont suscitée.

Enfin, je souhaite à Madame Marois une campagne qui honorera la grande femme qu’elle est. Et que le plus compétent gagne sur celui qui frappe et haï.

 Merci à l’auteure de nous avoir proposé cet article publié aussi dans son blogue du Huffington Post Québec.

Mis en ligne sur Sisyphe, le 27 mars 2014



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Sylvie Bergeron, auteure, éditrice, coach, conférencière



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