À la suite de votre reportage du 4 décembre 2016 (1), "Comprendre ces Québécoises qui portent le niqab", j’ai réalisé plus que jamais à quel point Radio-Canada a perdu son sens critique jusqu’à accepter de publier un reportage basée sur une étude commanditée par le Conseil canadien des femmes musulmanes. (2)
De la pure propagande. Peu avant 2001, le film "Kandahar" était sorti. Pour la première fois, on voyait sur nos écrans ces femmes qui devaient se couvrir des pieds à la tête. Sans exception, tout le monde trouvait que c’était une aberration. Aberration tellement grande qu’on aurait pu croire à une farce. Et maintenant, pour faire accepter cela dans les mentalités, on en fait la promotion à la TV.
Radio-Canada, s’il avait refusé ce reportage, avait-il peur d’être taxé d’islamophobe et de xénophobe ? C’est le meilleur moyen de museler toute critique.
Il n’y a pas si longtemps Radio-Canada, sans trop s’en rendre compte, se faisait la courroie de transmission de l’Institut économique de Montréal, en relayant ses questions : Serait-il temps de privatiser la SAQ ? Serait-il bon de privatiser une partie d’Hydro-Québec pour aider à la réduction de la dette ? Les Québécois paient-ils trop d’impôt ? Le Québec est-il trop endetté ? Plus de privé dans notre système de santé serait-il plus efficace ? etc.
Toutes questions qui, mine de rien, faisaient avancer l’idéologie néolibérale : seul le "libre-marché" est efficace et tout ce qui est règlement de l’État ne peut que nuire au sacro-saint libre-marché. Heureusement, maintenant Radio-Canada semble plus prudent, c’est un peu moins pire de ce côté.
Même tactique de la part des intégristes : ils avancent masqués. Comme l’a décrit si bien Yolande Geadah dans son livre Femmes voilées, intégrismes démasqués.
Ils ont compris que Radio-Canada était, pour eux, une bonne courroie de transmission.
Avez-vous au moins pris le temps d’enquêter sur qui compose ce Conseil canadien des femmes musulmanes et qui le finance ? Il n’y a pas que Daesh qui est fort en communication. Les intégristes ont compris que par toutes sortes de moyens détournés - une étude par-ci, une exposition par-là, et bientôt ce sera des films, des pièces de théâtre - ils font avancer leur idéologie qui sans trop en avoir l’air promeut l’inégalité des sexes.
Toutefois, réussir à avoir un reportage à la TV, c’est le gros lot, c’est ce qui rejoint le plus de gens, et le plus rapidement.
Y a-t-il un moyen plus clair pour promouvoir le message que les femmes devraient disparaître de la place publique que le fait de les envelopper de leur vivant dans un linceul ? En attendant qu’elles soient confinées pour de bon dans leur maison.
Ne réalisez-vous que les imams, ceux qui ont une conception rigoriste de l’islam, mettent les femmes à l’avant-plan pour faire avancer leur cause ? Ils savent bien que ces femmes qui revendiquent que c’est leur choix, sont leurs meilleurs ambassadrices, leur meilleur moyen de gagner en crédibilité et de faire avancer leur cause.
Tout comme les prostitueurs vont mettre à l’avant-plan des femmes proclamant que c’est leur choix de se prostituer.
Ces tactiques de détournement et de manipulation ne sont pas nouvelles. Dans les années 30, s’opposant aux suffragettes, évêques et curés ont manipulé des femmes catholiques qui proclamaient que le droit de vote des femmes n’était pas souhaitable et qu’elles n’en voulaient pas.
Dans les trois situations, des hommes mettent des femmes à l’avant-plan pour valoriser leur cause.
À quand le reportage : Comprendre ces femmes qui se font les ambassadrices d’une cause qui nuit à l’égalité hommes-femmes ? Je suis certaine qu’une enquête de fond sur ce sujet vous permettrait de découvrir des choses fort intéressantes et très juteuses.
Comme le dit si bien l’annonce de Du Proprio : "Pour trouver les bonnes réponses, il faut se poser les bonnes questions".