par Michèle Sirois, Coordonnatrice de la Coalition Laïcité Québec

Je viens de lire l’annonce que vous faites de la soirée de discussion qui doit avoir lieu le jeudi 28 octobre 2010 au Commensal. Je suis abonnée au Monde diplomatique et je le lis depuis une trentaine d’années. J’ai également participé aux débats organisés par les Amis du Monde diplomatique à quelques reprises. Je suis surprise que les annonces de vos activités qui me parviennent en ce qui a trait à la laïcité soient toujours libellées de la même façon. Je ne constate aucune évolution dans la pensée des personnes qui rédigent ces annonces. Pourtant, lors des soirées, je constate des débats intéressants qui présentent divers points de vue (surtout en provenance de la salle, car j’ai constaté que vos invités se situaient presque tous dans un même courant d’idées). Lors de ces soirées, quand j’ai entendu les personnes qui présentaient des points de vue favorables à une laïcité authentique et qui se voulaient critiques par rapport à une laïcité ouverte aux accommodements religieux, je n’ai jamais constaté de propos islamophobes ou racistes. Pourtant, le libellé de vos conférences-causeries et les invités traitant de ce sujet sont presque toujours accusateurs, sans aucune nuance. Tout ce qui n’est pas ouvert aux accommodements religieux est toujours suspecté, voire accusé de racisme. Votre énoncé semble rendre même suspecte la lutte pour l’égalité des sexes.

Est-ce que cela veut dire que votre pensée reste constamment et à tout jamais imperméable à quel qu’argument que ce soit, qui s’écarte de la ligne d’opinion que vous professez depuis quelques années ? Est-ce que cela ne traduit pas une certaine rigidité de pensée ? En dehors de la laïcité « dite ouverte », ni aurait-il que des racistes ? Cela me semble très réducteur et indigne des standards du Monde diplomatique qui nous a habitués à des analyses fouillées, documentées et qui se situent à un niveau d’analyse élevé.

Je sais qu’il existe des courants de droite islamophobes, xénophobes et qui tiennent des discours anti-immigrants. Je peux le constater tout comme vous. Je les combats tant que je peux et partout où je les rencontre. Heureusement qu’ils sont encore minoritaires au Québec. Par contre, je sais qu’il y a des gens tout à fait éclairés, progressistes, et qui sont également favorables à une laïcité « ouverte à la raison » et aux droits humains (et non pas « ouverte aux accommodements religieux »), une laïcité qui se situe en droite ligne avec le siècle des Lumières. J’apprécierais donc grandement que vous teniez compte du fait qu’il existe un autre point de vue que le vôtre, point de vue conforme à l’opinion majoritaire des Québécois et porté par de grands esprits comme Guy Rocher (professeur de sociologie émérite et père de la révolution tranquille), Wassyla Tamzali (avocate et féministe d’origine algérienne), Me Julie Latour (ex-bâtonnière du Barreau de Montréal), pour n’en nommer que quelques-uns. Vous auriez tout intérêt à lire Une femme en colère, de Wassyla Tamzali, publié chez Gallimard ou le livre de Diane Guilbault, Démocratie et égalité des sexes (éditions Sisyphe), ou encore le livre de la Québécoise d’origine égyptienne, Yolande Geadah, Accommodements raisonnables : droit à la différence et non différence de droits (VLB éditeur). Ces trois femmes, qui ne peuvent être soupçonnées d’islamophobie, pourraient beaucoup contribuer à l’évolution de la pensée de votre groupe, à condition bien sûr que vous soyez ouverts à d’autres points de vue.

Je vous recommande également la lecture d’allocutions prononcées par Guy Rocher et par Me Julie Latour.

Je reste disponible pour vous faire des suggestions de panelistes si, bien sûr, vous êtes ouverts à la diversité des points de vue.

Michèle Sirois
Coordonnatrice de la Coalition Laïcité Québec

Les Amis du Monde diplomatique - Groupe de Montréal

Soirée de discussion

Depuis la crise des accommodements raisonnables, on voit se manifester au Québec des comportements qui semblent témoigner d’une sorte de xénophobie rampante ou d’un racisme qui n’ose pas dire son nom. Parfois aussi, enrobé dans un discours sur l’égalité hommes-femmes et sur la laïcité, nous avons affaire à une intolérance au quotidien qui démontre souvent une profonde ignorance des populations arabes et musulmanes et, plus largement, de la place que tient la religion dans la plupart des sociétés non-occidentales. Peur de l’étranger sous la façade d’un discours laïciste ou bien nationalisme exacerbé par la peur de disparaître dans le grand tout anglophone que constitue l’Amérique du Nord ? La société québécoise est-elle plus intolérante depuis les accommodements raisonnables, ou, plus simplement, les médias n’ont-ils fait que mettre l’accent sur une peur de l’étranger qui existait depuis longtemps dans cette même société ? Ce sont les questions que nous nous poserons lors de cette rencontre dans l’espoir de développer des stratégies collectives favorisant une pratique dynamique des rapports interculturels.

Nous inaugurerons à cette occasion une formule de discussion libre avec des invités connaisseurs du thème traité. Le Commensal du 1720 Saint-Denis nous donne gracieusement accès à sa salle de conférence située à l’étage surplombant la caisse, moyennant qu’une majorité des personnes présentes mangent sur place.

Jeudi le 28 octobre à 19 heures

(on peut arriver à compter de 18 heures)

Invités :

Paul Eid, commission des droit de la personne
Ralph Rouzier, conseil des relations interculturelles
Information : courriel - Tél. : 514-273-0071

Mis en ligne sur Sisyphe, le 26 octobre 2010

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