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> Le lien entre télé et criminalité EXISTE

8 février 2007, 20:37, par JACQUES BRODEUR

Le lien préoccupe les parents de toute l’Amérique du Nord et de l’Europe. Les chercheurs invoquent trois facteurs pour expliquer la hausse des troubles de comportement chez les enfants qui fréquentent les écoles primaires d’Amérique du Nord. (1) Au Québec, le nombre d’enfants aux prises avec ces troubles a crû de 300% entre 1985 et 2000 (15 ans). (2) Les trois mêmes facteurs ont aussi contribué à la hausse des crimes violents, alors que les crimes contre la propriété n’ont cessé de décroître. (3) Structure familiale fragilisée, encadrement parental déficient et exposition massive à des divertissements violents. Depuis 50 ans, un nouveau parent s’est glissé dans nos foyers, un parent qui a utilisé les dernières connaissances en psychologie pour charmer les enfants, leur enseigner à asticoter leurs parents, —les annonceurs connaissent bien le NAG factor— à les culpabiliser, à les manipuler. Pendant que les parents biologiques ont réduit à 38 minutes par semaine le temps consacré à converser avec leur enfant, les agences de marketing ont dénigré l’autorité parentale pour faire désirer aux enfants des choses insignifiantes, pour transformer ces désirs superficiels en besoins essentiels. Cela a nourri diverses pandémies telles que l’obésité, le déficit d’attention, la violence physique et verbale, pour ne nommer que celles-là. Ce nouveau parent —souvent déguisé en gardienne d’enfants— a réduit la crédibilité des parents biologiques aux yeux de leur progéniture et conquis une grande importance dans le cœur et l’esprit des enfants qui y passent entre 20 et 30 heures par semaine.

La violence utilisée dans les médias est un ingrédient de marketing puissant. Depuis 1994, les réseaux privés québécois ont augmenté les doses de 432%. On utilise la violence massivement pour abuser des enfants et des ados, particulièrement vulnérables à cet ennemi millénaire de l’humanité. Résultat ? Les crimes violents des adultes canadiens ont augmenté de 400% au cours des 44 dernières années. C’est chez les jeunes que la hausse est le plus prononcée au point que, selon le rapport du ministère québécois de la Sécurité publique publié en 2001, leur taux de crimes violents est maintenant le double de celui des adultes.

Des chercheurs ont mesuré la corrélation entre l’exposition à la télé et le comportement violent et l’ont comparée à d’autres. Elle est plus élevée que celle entre l’exposition à la fumée secondaire et le cancer du poumon, que celle entre l’exposition au plomb et l’activité cérébrale, que celle entre l’absorption de calcium et la masse osseuse, que celle entre les travaux scolaires et la réussite scolaire, que celle entre le port du condom et la non-transmission du VIH, que celle entre l’exposition à l’amiante et le cancer. (Doug Gentile & Craig Anderson, Université de l’Iowa, Brad Bushman, Université du Michigan.) (5)
Les jeux vidéo de type FPS (Qui est-ce qui va faire feu le premier ?) sont des simulateurs de meurtres. Ils représentent un chiffre d’affaires annuel de 10 milliards de dollars US. La moitié des élèves du 3e cycle du primaire s’y adonnent régulièrement. On a constaté que les jeunes affichent un comportement antisocial dès qu’ils cessent de jouer : augmentation de 43% des pensées agressives, hausse de 17% des réponses violentes à la provocation. Les jeux vidéo comptent pour 13 à 22% dans la hausse des comportements violents des adolescents. On peut se faire une idée de l’impact en comparant avec le tabac, qui compte pour 14% dans la hausse des risques de cancer. (6)

Télé et criminalité
Le Dr Frederick Zimmerman, professeur à l’École de santé publique de l’Université de Washington, a découvert que les enfants qui passent 3½ heures par jour devant la télé augmentaient de 25% les risques de devenir intimidateurs à 6 et 11 ans. « Regarder la télé ne signifie pas qu’on deviendra nécessairement intimidateur, mais que plus on en regarde, plus on augmente les chances de le devenir. » On a mesuré la correlation entre le temps de visionnement durant l’enfance et les activités criminelles à l’âge adulte. On a découvert que les enfants qui passaient plus de temps devant la télé ont commis plus crimes à l’âge adulte que ceux qui étaient déjà plus violents en bas âge. Dans une étude s’étalant sur une période de 17 ans, on a suivi 700 jeunes jusque dans leur vie adulte. (7) Le Dr Zimmerman a mesuré les probabilités chez 1 300 enfants. Il a constaté que chaque heure de télé à l’âge de 4 ans accroît de 9% les probabilités de devenir un tyran de la cour d’école 5 ans plus tard. (8)

Il faut espérer que notre société se réveillera plus rapidement que pour les changements climatiques.
Jacques Brodeur, conseiller en Prévention de la violence,
Éducation à la Paix, Éducation aux médias.
www.edupax.org

(1)) School violence hits lower grades, USA Today, January 13, 2003.
http://www.edupax.org/Assets/divers/documentation/17_violence/School_violence_hits_lower_grades.html
(2) Le nombre d’enfants québécois au comportement troublé a augmenté de 300% en 15 ans. Les causes. http://www.cse.gouv.qc.ca/FR/Article/index.html?id=2001-05-003&cat=2001-05-01
(3) Le taux de crimes violents des jeunes est deux fois plus élevé que celui des adultes, Ministère de la sécurité publique du Québec, Statistiques 2001, page 24. http://www.edupax.org/Assets/divers/documentation/3_criminalite/violent_youth_crime_rising.html
(4) Impact of Entertainment Violence on Children, Joint Statement to the Congressional Public Health Summit by four organizations : the American Academy of Pediatrics, the American Academy of Child & Adolescent Psychiatry, the American Psychological Association, the American Medical Association, July 2000. http://www.aap.org/advocacy/releases/jstmtevc.htm
(5) Dr. Doug Gentile, corrélations presentées au 3e Summet d’ ACME, Burlington, VT, Octobre 2006. Correlations also confirmed by the Media Resource Team of the American Association of Pediatrics, “Media Violence,” Archives of Pediatric Adolescent Medicine 108:5 (2001). http://www.aap.org/policy/re0109.html

(6) Michael Rich, Protecting Children in the Information Age, Center on Media and Child Health, Harvard School of Public Health, présentation au 3e Summet d’ ACME, à Burlington, au Vermont. http://www.aap.org/advocacy/rich-mediaviolence.pdf

(7) Étude longitudinale s’étalant sur 17 ans, Dr. Frederick Zimmerman, Study Ties TV Time to School Bullying, April 2005. http://www.edupax.org/Assets/divers/documentation/7b8_television/Study%20ties%20TV%20time%20to%20school%20bullying.html
(8) Le temps passé à la télé augmente les risques.
http://www.smh.com.au/news/National/Television-turning-on-bullies/2005/04/05/1112489490638.html

Voir en ligne : L’isolement, la pire des violences