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mercredi 15 décembre 2010 L’Assemblée nationale du Québec a adopté à l’unanimité une motion contre la polygamie
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La députée péquiste de Rosemont, Louise Beaudoin, conjointement avec la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine, la députée de Lotbinière, le député de Mercier, le député de La Peltrie et le député des Chutes-de-la-Chaudière, a fait adopter à l’Assemblée générale le 25 novembre la motion suivante : « Que l’Assemblée nationale affirme que la polygamie ne fait pas partie des valeurs fondamentales de la société québécoise, qu’elle estime que cette pratique va à l’encontre du droit à l’égalité entre les femmes et les hommes, et qu’elle salue la position exprimée en ce sens par le Conseil du statut de la femme. » (1) Soulignant que le gouvernement de la Colombie-Britannique s’adresse à sa Cour suprême afin qu’elle se prononce sur la constitutionnalité de l’article 293 du Code criminel interdisant la polygamie, Louise Beaudoin a invité ses collègues à rejeter formellement la polygamie et à appuyer l’avis du Conseil du statut de la femme, La polygamie au regard des droits des femmes (2). Elle a rappelé que le CSF rejette la polygamie « essentiellement parce qu’elle est une atteinte à l’égalité des sexes, parce qu’elle est incompatible avec l’égalité des hommes et des femmes et le respect des droits des femmes et la dignité des femmes tels qu’on les entend aujourd’hui ». La députée de Rosemont a ajouté que la polygamie – « archaïque, rétrograde, cette forme d’esclavage » – entraîne des conséquences dramatiques pour les femmes et les enfants dans les pays où elle se pratique. « Si au nom de la liberté de religion, si au nom du multiculturalisme - parce que ce sont les arguments qui sont employés par les défenseurs de la polygamie au Canada - si au nom donc de la liberté de religion et du multiculturalisme, on acceptait dorénavant la polygamie, le Canada serait le seul pays occidental à le faire », a conclu Louise Beaudoin en invitant ses collègues à appuyer la motion. La députée adéquiste de Lotbinière, Sylvie Roy, a rappelé qu’il y a dans le monde « un large mouvement féministe qui lutte contre la polygamie », et plusieurs pays, où elle se pratiquait légalement, l’interdisent désormais. Elle a qualifié la polygamie de forme d’appropriation des femmes par des hommes, une situation qui engendre des violences physiques et psychologiques pires que la violence conjugale « parce que c’est un système institutionnalisé, et l’on doit crier haut et fort qu’au Québec ce n’est pas acceptable. » Le député de Mercier (Québec solidaire), Amir Khadir, a déclaré pour sa part que son parti « rejette avec force toutes les formes institutionnelles ou non-institutionnelles de discrimination à l’endroit des femmes. » Il a senti le besoin de justifier la position de Québec solidaire sur la question du port du voile islamique dans les institutions publiques, affirmant qu’il avait pris position « non contre le port de voile dans certaines institutions publiques ou parapubliques, mais contre le principe même du voile (…) comme un instrument de domination et d’asservissement des femmes, comme un symbole de violence institutionnalisée à l’égard des femmes. C’est-à-dire que, pour nous, la bataille doit se mener par rapport aux institutions religieuses elles-mêmes, non pas à celles qui en sont victimes. » (3) Le député de Mercier a déclaré au sujet de la polygamie : « Il est certain que nous rejetons avec le plus de véhémence possible toute atteinte à la liberté des femmes et toute atteinte à la dignité des femmes, et la polygamie en est une particulièrement virulente que nous tenons à rejeter. » (4) Il a expliqué l’importance et la manière de contrer le pouvoir religieux dans la société : « En fait, toutes les institutions de pouvoir religieux sont des institutions de pouvoir patriarcal. Et c’est dans un rejet de toute influence de la religion dans nos sociétés qu’il faut peu à peu combattre la possibilité par les défenseurs de ces modèles de pouvoir imposer leurs modèles à nos sociétés, à nos législations. » Pas en combattant l’imposition de ces contraintes du « pouvoir patriarcal » qui limitent la liberté et les droits des femmes, apparemment, mais en mettant fin au financement des écoles privées « derrière lequel se cachent plusieurs de ces groupements pour obtenir des financements et pour maintenir des foyers d’endoctrinement pour en arriver à imposer ce modèle. » Enfin, la députée de l’Acadie et ministre de la Culture et de la Condition féminine, Christine St-Pierre, a déclaré que la position du Conseil du statut de la femme était aussi la sienne et celle du gouvernement. « Nous respectons la liberté des pratiques religieuses, nous soutenons la diversité culturelle, mais cette liberté et ce soutien ne peuvent servir de prétexte à la polygamie, une pratique contraire à une valeur fondamentale de notre société démocratique, soit l’égalité entre les hommes et les femmes. Les relations polygames renforcent, symboliquement et concrètement, un rapport d’inégalité sexuelle qui perpétue des stéréotypes et qui confirme un rapport historique de domination des femmes par les hommes. « Nous partageons l’opinion du Conseil du statut de la femme à l’effet qu’il ne faut pas banaliser le phénomène, qu’il serait naïf de croire qu’il suffirait de décriminaliser la polygamie pour éliminer tous les problèmes qui y sont liés et que, par conséquent, celle-ci doit demeurer explicitement interdite au pays. Et j’ajouterai, M. le Président, que d’ouvrir la porte à cette pratique s’inscrirait en contradiction avec les engagements internationaux du Québec en matière d’égalité entre les femmes et les hommes », a conclu la ministre. La motion a été adoptée à l’unanimité. Notes
Lire aussi : . Homa Arjomand, « Polygamy in Canada Should Remain Illegal ». Nous publierons la traduction française de ce texte bientôt. Mis en ligne sur Sisyphe, le 26 novembre 2010 |