par Martin Dufresne

"The world’s oldest profession"
"It exists, it thrives in Canada"
"the ‘pimp’ mythology"

C’est avec des arguments comme ceux-là que la CBC a présenté ce matin, à l’émission radio "The Sunday Edition", animée par Laura Lynch, une "entrevue" d’une demi-heure avec un avocat torontois à qui on a essentiellement passé le micro pour étaler complaisamment la rhétorique de l’industrie du sexe pour réclamer l’abolition de la loi contre le proxénétisme au nom des bordels merveilleusement sécuritaires que ses clientes veulent créer.

Alan Young a, par exemple, prétendu qu’une prostituée n’avait le droit d’engager qui que ce soit sans faire de cette personne un "proxénète", "vivant de la prostitution d’autrui", une prétention absolument non appuyée par des faits.

Il a nié que le crime organisé avait pris de l’ampleur dans les pays où la prostitution avait été normalisée - alors que si... Il a accumulé les prétentions contradictoires sur la sécurité d’être prostituée hors de vue... parce qu’il n’y avait aucune abolitionniste pour lui donner la réplique.

Young a pu, sans être réellement confronté par l’animatrice, bâtir ses arguments pro-bordels, pro-proxénètes, en s’en prenant aux femmes prostituées dans la rue - "No one should work on the street" - dont sa poursuite exploite la condition mais va donner le feu vert aux prostitueurs.

"There are a certain number of women that will be left behind by this decision... We save a few people, we have done our job." Pour le reste de la population des femmes piégées dans la prostitution, Young se lave les mains et renvoie à des règlements de zonage pour chasser les femmes pauvres des trottoirs des quartiers riches.

Mais tout cela, l’animatrice ne l’a pas dit et la CBC n’a permis à personne de le dire, ce qui est un scandale pour des gens qui se font fort de présenter "a balanced view".

Si vous voulez l’entendre, c’est à partir de 1h 03 min 50 secs dans ce podcast.

Si vous vous demandez ce qu’auraient pu répondre les femmes directement concernées et les associations féministes qui appuient leur lutte, réduites à quelques phrases désarticulées pour présenter Maître Young, réclamez-le à la CBC, qui devrait rendre des comptes pour une présentation aussi biaisée d’un enjeu aussi important pour les droits des femmes : http://www.cbc.ca/contact/. Adresse courriel : thesundayedition@cbc.ca

La Cour suprême du Canada va entendre le 13 juin les arguments de la Coalition des femmes pour l’abolition de la prostitution : voir ici. Ne serait-il pas normal que la population puisse aussi le faire ?

Mis en ligne sur Sisyphe, le 3 juin 2013

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