Montréal, lundi le 8 février 2016 - Les dernières semaines ont été marquées par la disparition de jeunes filles, recrutées dans la prostitution.
La Concertation des luttes contre l’exploitation sexuelle (CLES) qui travaille au quotidien avec des femmes qui sont ou ont été dans l’industrie du sexe souhaite envoyer le message suivant aux médias et au public : il existe des causes sociétales expliquant le recrutement de mineures dans la prostitution et les gouvernements ont les moyens de s’attaquer à ces causes.
On a beaucoup parlé, ces derniers jours, de gangs de rue, de jeunes rebelles et de Centres Jeunesse. On a également abordé la question de la banalisation de la prostitution, voire de sa « glamourisation ».
Mais on semble avoir oublié un élément fort important : les clients de la prostitution. C’est en effet la demande des clients pour des filles toujours plus jeunes qui fait en sorte que celles-ci deviennent des proies de choix pour les recruteurs.
« C’est l’industrie du sexe qui crée la demande qui, elle, conditionne le recrutement. Il faut s’attaquer à cette industrie et à sa banalisation. Il faut contrer le discours qui travestit cette forme de violence envers les femmes en un ‘travail choisi’ et propage l’idée que les hommes ont le droit d’acheter l’accès au corps des femmes et des filles », explique Diane Matte, organisatrice communautaire à la CLES.
Pour agir contre la demande et la banalisation de l’industrie du sexe, de nombreux moyens existent déjà.
Sur la scène fédérale, le projet de loi C-452, puissant outil de lutte contre la traite des personnes, n’attend que la signature du décret de mise en application pour être effectif.
De son côté, la Loi sur la protection des communautés et des personnes victimes d’exploitation - qui criminalise les clients et interdit d’annoncer ou de vendre les services sexuels d’autrui – est en vigueur depuis plus d’un an.
Malheureusement, le manque de volonté politique se traduit par des effectifs policiers insuffisants et une absence de directives claires quant à l’application de la loi.
Sur la scène provinciale, le plan d’action en exploitation sexuelle, promis par le gouvernement il y a trois ans, se fait toujours attendre. Tout comme les fonds qui devraient l’accompagner.
Quant à la politique gouvernementale pour l’égalité entre les femmes et les hommes, elle reconnaît l’exploitation sexuelle comme étant la manifestation d’un abus de pouvoir, qui ne peut être toléré dans une société qui défend les valeurs de justice et d’égalité et promet la réalisation de deux campagnes de sensibilisation sur la prostitution… en 2014 et 2015 !
Quant aux gouvernements municipaux, il ne faut pas oublier que ceux-ci ont le pouvoir de refuser d’émettre ou de révoquer les permis d’exploitation de lieux que l’on sait être des lieux de prostitution, comme c’est le cas des salons de massage dits « érotiques ».
Loin d’être des endroits « sécuritaires », derrière les portes closes de ces salons, il est aisé d’employer des mineures ou des victimes de traite.
Il est grand temps que les gouvernements allient la parole aux actes. Lois et politiques gouvernementales doivent s’accompagner de mesures concrètes pour changer les mentalités et s’attaquer à la cause du problème : la demande des hommes pour des actes sexuels tarifés.
Cela passe, oui, par l’éducation sexuelle des jeunes, mais aussi par la sensibilisation des moins jeunes via des campagnes sociétales, par l’application des lois et le soutien financier des organismes qui luttent contre l’exploitation sexuelle.
– Pour plus d’information : Éliane Legault-Roy , responsable des Communications à la CLES : Courriel.