Cette main nue qui la touche
sur l’écorce du rêve
porte aux jointures l’oiseau
et son ciel intangible
Je t’aime comme l’eau le bleu de l’eau
c’est tout ce qu’elle a pu dire
en cet instant incomparable du saut
où il ne lui reste plus qu’à être
Elle peut bien conjuguer à l’absolu
tous ses mots ses images ses éclaircies
apprendre les dialectes de l’amour
elle a une longueur de plus sur le temps
Vos souffles sont si proches du feu
à portée et puissance égales d’infini
qu’elle ne sait pas qui de vous deux
tend sa vie sa voix ses lèvres à l’autre
Chaque pas de la lumière
sur la transparence éblouie de l’eau
reflète le dessein parfait de l’univers
à l’intérieur de ses mots
Au-dessus des nuages elle touche
ce lieu de toi caché aux regards
cette tension unique de l’amour
vers l’accomplissement du poème
Le froid revenu le feu ne s’altère pas
à travers la forêt labile du doute
elle avance sur un fil très court
la veine du ruisseau sous les tempes
Comme la vie le vent son poème
veut se lire à l’endroit et à l’envers
dire en tous les sens le passage
de la lumière sur ta peau parlante
Elle ne s’habitue jamais à ta venue
à la beauté à l’effervescence folle de l’air
à la vague intense des sons des couleurs
à ce saisissement soudain de l’âme
Elle ne sait à peu près rien de toi
sauf ta main posée sur ses mots
te reconnaître et pouvoir sentir
l’univers rêver sous tes paupières
Elle ignore de ta main ou de tes mots
quelle douceur allume le feu sur ses côtes
quelle vague la soulève si haut si près
de l’infini qu’elle n’a plus peur du vertige
Elle te cherche dans les rapides du silence
où tout lui devient signe
l’éclair vif d’une pensée
l’extase entre l’or et le bleu de l’impossible
Dès l’instant où il entrouvre les rideaux
le soleil ne lui parle que de toi
et porte chaque mot à l’incandescence
dans l’obscur été de son corps
Elle croit que l’esprit ne se lasse
ni de l’amour ni du rêve ni du soleil
car il est mouvement et quête
pulsation extatique de l’infini en soi
Elle parle sous l’eau pour durer
car la voix seule nous survivra
sa langue déplie le vif du silence
sur tes lèvres elle n’a plus d’âge