À la suite du désaveu de la ministre de l’Environnement MarieChantal Chassé, des chroniqueurs ont fustigé le principe de parité soulignant, entre autres, que la compétence devrait toujours être l’élément primordial pour choisir un.e membre du conseil des ministres. (1)
Tous ces hommes qui ont pratiqué le pouvoir depuis la nuit des temps auraient d’abord été choisis pour leurs compétences ?
Combien de candidats ont été choisis, parfois, tout simplement parce que c’était « un chum », le « chum » d’un « chum », un contributeur à la caisse du parti, ou quelqu’un à qui on en devait une. Et pour combien d’autres raisons aussi troubles ?
Combien ont été choisis lors de rencontres des « boy’s club » au club de golf, ou lors d’une partie de chasse, et même dans l’un des nombreux bars de danseuses nues ?
Les opposants à la parité mettent la nomination des femmes sous condition alors que le système qui a prioritairement privilégié les hommes a bien souvent pris pour acquis la compétence des hommes ! Ou mieux, il la surestimait ou la jugeait secondaire.
Ces opposants se réfèrent à une norme, où le pouvoir semble avant tout dédié aux hommes. Et gare à celui et surtout celle qui remettra en question ce « droit DES hommes à exercer le pouvoir » !
« Le pouvoir accordé aux hommes est tellement ancré dans les mœurs qu’il semble véritablement une seconde nature masculine. Tellement que tout ce qui est fait pour établir un nouveau projet de société s’interprète comme un traitement de faveur envers les désavantagées », affirmai-je dans un article sur le site féministe Sisyphe.org en 2014. (2)
Et si l’on vise la parité en exigeant des quotas, les militant.e.s pour la parité en prennent encore plus pour leur rhume.
Et pourtant ! « Les quotas seraient discriminatoires envers les hommes, précise Drude Dahrelup, professeure à l’Université de Stockholm, auteure de la première étude mondiale sur l’utilisation des quotas, si la situation était au départ équitable pour tous et toutes. » (3)
« Il faut […] rappeler que les hommes sont élus depuis de nombreuses années sur la base de quotas officieux », disait-elle. LA norme. (4)
Selon Mme Drude Dahrelup, une des résistances à l’égalité de la pratique du pouvoir est la vision libérale du mérite et un quota semble toujours instiller le danger d’une démesure en défaveur des hommes, comme je le soulignais aussi.
Le désaveu de Marie-Chantale Chassé n’a rien à voir avec la parité parce qu’elle n’est pas nécessairement LA candidate qui a permis de faire pencher la balance de l’égalité des sexes entre les candidat.e.s.
L’équilibre est déterminé par le choix d’un ensemble de candidat.e.s. Il aurait d’ailleurs été plus équitable que le premier ministre François Legault rétablisse cet équilibre lors du changement.
On peut questionner la compétence de Mme Chassé en matière d’environnement ou ses capacités à communiquer, on peut questionner le choix du premier ministre, François Legault, mais comme l’a déjà dit Nathalie Petrowski : les femmes n’ont pas le monopole de l’incompétence ! (5)
Qui dit qu’on n’a pas choisi des hommes incompétents pour former cet équilibre, comme on l’a déjà fait ? Et que d’innombrables femmes compétentes n’ont pas été oubliées ?
Combien d’hommes incompétents, corrupteurs, fraudeurs, opportunistes ont exercé le pouvoir depuis la mise sur pied du premier gouvernement ? Est-ce qu’on a accusé le trop grand favoritisme dont ils ont pratiquement toujours fait l’objet ? La complicité masculine du système patriarcal ?
La compétence des femmes est devenue un prétexte pour discréditer la parité.
La parité vise l’égalité de la représentativité et non pas l’évaluation des compétences !