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jeudi 21 décembre 2006 Légaliser la prostitution, c’est ouvrir la porte au trafic international des humains
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Alors que le gouvernement du Canada signe depuis quelques années des conventions et des protocoles, par exemple celui de Palerme en 2001, par lesquels il s’engage à lutter contre l’exploitation sexuelle des femmes, voici qu’un sous-comité de l’examen des lois sur le racolage vient de déposer à la Chambre des communes un rapport (non unanime) demandant à toutes fins utiles de légaliser la prostitution au Canada. De fait, la prostitution comme telle n’est pas illégale au Canada. Ce qui est illégal, c’est le proxénétisme, c’est d’exploiter des lieux de prostitution (bordels, salons de massages érotiques, agences d’escortes, etc.), de se trouver dans ces lieux, de solliciter une personne pour faire de la prostitution (prostituées ou clients), de faire le transport de ces personnes vers un lieu de prostitution et, bien évidemment, toute espèce d’exploitation sexuelle des personnes de moins de 18 ans. Le sous-comité est contre l’exploitation sexuelle des mineures. Après 18 ans, il l’accepterait si la personne qui se prostitue donne son consentement. Elle sera une travailleuse du sexe, son proxénète sera un entrepreneur autonome respectable et l’agence, une entreprise d’affaires. Pour justifier que de fait, les personnes prostituées sont consentantes, le sous-comité a entendu plusieurs témoignages de personnes prostituées allant dans ce sens. Or de nombreuses études, faites ici comme dans d’autres pays occidentaux, et d’ailleurs mentionnées dans le rapport lui-même, ont démontré que si autour de 8 % des personnes prostituées sont consentantes et participent au lobby de la légalisation, 92 % d’entre elles veulent en sortir et considèrent qu’elles sont d’une façon ou d’une autre exploitées dans ce prétendu « métier ». D’abord besoin d’aide Les membres du sous-comité de même que les organismes les plus favorables à la légalisation de la prostitution admettent que les femmes entrent dans la prostitution à l’âge de 14 ans en moyenne. Or, à 18 ans, elles deviendraient soudainement consentantes ? Les recherches nous démontrent plutôt qu’arrivées à 18 ans, la majorité d’entre elles sont conditionnées par le milieu, qu’elles ont perdu l’estime d’elles-mêmes, ne se croient plus bonnes à rien d’autre et continuent ce « métier » en recourant à la drogue ou l’alcool. La plupart d’entre elles sont venues à la prostitution parce qu’elles ont été agressées sexuellement dans l’enfance, parce qu’elles ont été victimes d’inceste, de parents indignes. Elles ont besoin d’aide, pas qu’on facilite la tâche à leurs exploiteurs et qu’on continue à les criminaliser. Or, sous prétexte de protéger les personnes prostituées du harcèlement policier et en vue de leur procurer des conditions de travail plus sécuritaires et plus saines, ce sous-comité, tenant compte que la prostitution est légale au Canada, propose qu’on en précise les conditions d’exercice, c’est-à-dire de considérer comme « travailleuses du sexe » celles que les comptes rendus de leur vie désignent comme victimes d’une exploitation sexuelle réelle. On voudrait nous convaincre que tout cela est en vue du bien-être des femmes exploitées dans la prostitution alors que les seuls qui en sortiraient gagnants sont des hommes : les clients, les proxénètes, les tenanciers de bar, de salon, etc. Pendant ce temps, à Amsterdam, la capitale de la prostitution, on constate que les mesures d’encadrement ont échoué et les femmes encore plus en danger, et le trafic humain en plein essor. Approche néo-abolitionniste Le groupe CATHII considère que la légalisation de la prostitution, car c’est de cela qu’il s’agit ici, ouvrirait la porte toute grande à l’intensification du trafic et de la traite des humains, un fléau international qui ne fait que commencer à nous envahir et à faire des victimes. Nous préférons l’approche néo-abolitionniste qui privilégie la décriminalisation des personnes prostituées et la criminalisation des utilisateurs, des proxénètes et autres exploiteurs de la prostitution des autres, approche qui ne va pas sans des mesures de protection des victimes, de sensibilisation des utilisateurs, de prévention de la pauvreté, d’éducation des jeunes et de soutien de celles et ceux qui veulent quitter la prostitution. CATHI croit qu’un débat de société est nécessaire sur cette question qui n’est pas d’abord une question de santé publique, mais fondamentalement une question d’égalité entre les femmes et les hommes, du respect mutuel de la dignité de chacun. Paru aussi dans Le Devoir, le 15 décembre 2006. Publié sur Sisyphe avec l’autorisation des auteur-es. Mis en ligne sur Sisyphe, le 17 décembre 2006. |