Naître femme n’est pas gage d’une longue vie paisible dans de nombreux pays du monde, et les données d’une ONG argentine donne froid dans le dos. Ainsi, on apprend que, dans le pays du Cône Sud toutes les 30 heures, un féminicide est commis. Seulement au cours des sept dernières années, quelque 2384 femmes et filles ont été tuées sur le territoire national.
Cependant, au cours des 43 premiers jours de 2017, la fréquence des féminicides a encore augmenté de façon préoccupante : toutes les 18 heures, une femme est tuée. Ce chiffre, publié la semaine dernière par l’organisation civile La Casa del Encuentro, a bouleversé les consciences sociales dans le pays sud-américain, selon plusieurs médias locaux.
En 2016, 290 femmes ont été tuées, et 50% d’entre elles sont décédées à leur domicile, preuve que le foyer ne représente pas, contre toute attente, un lieu sûr, et ce nombre a même augmenté de 1,34% par rapport à 2015.
#NiUnaMenos Pour le droit de rester en vie contre la culture machiste
Les violences sexuelles sont devenues une préoccupation majeure en Argentine. La violence contre les femmes, du seul fait qu’elles soient des femmes, constitue d’ailleurs l’un des grands problèmes du pays. En réaction à ce terrible constat, des dizaines de manifestations de masse ont eu lieu au cours des dernières années pour dénoncer les féminicides, défendre les droits des femmes et demander que la justice s’applique efficacement aux agresseurs. La plupart de ces manifestations ont été organisées dans le cadre de la campagne « Ni Una Menos » (#NiUnaMenos) (« Pas une de moins »). Ce slogan est devenu un hymne à la vie pour les femmes du monde entier qui réclament tout simplement leur droit à rester vivantes !
L’une des données des plus inquiétantes que souligne le rapport d’ONU Argentine, c’est que seulement 9,7% des femmes assassinées avaient déjà déposé une plainte pour mauvais traitement. Ce qui signifie que les femmes, victimes de violence de genre, « ne croient pas en la justice » de leur pays et subissent la violence en silence.
Dans 55% des cas, les assassins étaient les compagnons ou ex-compagnons des victimes. L’objectif est donc de s’attaquer à la racine du mal, à savoir la culture machiste qui prévaut en Argentine. « Le féminicide est la partie visible de l’iceberg, qui masque un phénomène beaucoup plus profond, à savoir une société patriarcale extrêmement inégale », a déclaré le sénateur Juan Manuel Abal Medina. Les hommes et les femmes doivent lutter conjointement contre ce fléau, a déclaré l’ancien directeur général des droits de la femme, Guadalupe Tagliaferri, aujourd’hui conseiller pour l’Habitat et le Développement urbain de Buenos Aires (NiUnaMenos).
Entre 2009 et 2016, on a enregistré 2384 meurtres de femmes, des données qui comprennent les féminicides "par extension", c’est-à-dire les filles et les mères que des hommes tuent en même temps que leurs partenaires ou ex-partenaires.
Au cours de ces sept dernières années, 2919 enfants, dont 63% mineurs, ont perdu leur mère dans ces terribles circonstances, et ils se sont retrouvés orphelins, car dans de nombreux cas les meurtriers se suicident après avoir commis l’irréparable.
Augmentation de la violence en dépit des lois
En 2008, neuf pays d’Amérique latine ont adopté une législation spéciale sur le féminicide, ils sont actuellement au nombre de 16.
La violence sexiste en Amérique latine, en dépit des progrès relatifs aux programmes et aux lois qui la criminalisent, est en augmentation. Elle se manifeste sous diverses formes : psychologique, violence physique, harcèlement sexuel ou intimidation, entre autres. Le féminicide est la forme la plus grave et la plus extrême de violence contre les femmes (EL MUNDO).
Le 14 novembre 2012, les députés argentins ont adopté une loi incluant le féminicide comme homicide aggravé dans le Code Pénal : cela inclut une peine de prison à perpétuité pour tout homme attentant à la vie « d’une femme ou d’une personne qui s’identifie comme femme ».
La loi définit le féminicide comme « un crime contre une femme commis par un homme et qui implique une violence de genre » et des mobiles comme « le plaisir, la cupidité, la haine raciale, religieuse, le sexisme ou l’orientation sexuelle, l’identité ou l’expression du genre ». Alors que l’homicide est puni de 12 à 25 ans de prison, le crime de féminicide (contre femme, transsexuelle) encourt une peine à perpétuité.
–Source : Aline Timbert, administratrice bénévole du blogue Actu Latino, que nous remercions chaleureusement de sa collaboration.
Nous suggérons à nos lectrices et lecteurs de faire de ce blogue une source d’information sur les pays latino-américains.