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lundi 1er décembre 2008

L’ONU adopte une résolution islamiste contre le dénigrement des religions

par Micheline Carrier






Écrits d'Élaine Audet



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Sous l’influence des représentants islamistes, une commission du Conseil droits de l’Homme de l’ONU a adopté, le 24 novembre dernier, une résolution présumément destinée « à empêcher, y compris par la loi, le dénigrement des religions, et affirme que l’islam est souvent et faussement associé aux violations des droits de l’Homme et au terrorisme. » Risible quand on sait comment les droits des femmes sont violés, et même réprimés par la lapidation, l’emprisonnement ou la torture de celles qui les revendiquent, dans certains pays islamistes. Coïncidence : le jour même de l’adoption de cette résolution et de cette déclaration, des terroristes qui se réclament de l’islam tuaient 180 personnes et en blessaient près de 300 autres à Mumbaï en Inde. Certes, une exception qui confirme la règle.

La résolution adoptée par le Conseil des droits de l’Homme n’est pas contraignante. Elle a été co-parrainée par les pays islamiques avec l’appui du Bélarus et du Venezuela, et adoptée par 85 voix contre 50, avec 42 abstentions. L’an dernier, l’ONU avait adopté une résolution semblable par 108 voix contre 51, avec 25 abstentions.

Les pays occidentaux, qui y voient avec raison une tentative de limiter la liberté d’expression - et surtout la liberté de critique envers les fondamentalistes religieux -, ont tous voté contre la résolution. Les pays musulmans, ainsi que la Chine, Cuba et la Russie, ont voté en faveur. L’Assemblée générale, où siègent les 192 États membres de l’ONU, l’adoptera à son tour plus tard.

Selon l’AFP**, la résolution de l’ONU « exhorte les États à appliquer et, au besoin, à renforcer les lois existantes lorsque des actes, manifestations ou expressions de xénophobie ou d’intolérance sont dirigés contre les minorités et les migrants, afin de mettre fin à l’impunité dont jouissent les auteurs de tels actes ».

Le seul exemple de groupes victimes de discrimination en raison de leur religion que cette résolution mentionne à quelques reprises est le groupe des musulmans. Ce qui indique bien les destinataires de la résolution controversée. Elle dit « note[r] avec une vive inquiétude que la campagne globale de dénigrement des religions et l’incitation à la haine religieuse en général, notamment la discrimination ethnique et religieuse à l’égard des minorités musulmanes, se sont intensifiées depuis les événements tragiques du 11 septembre 2001 ».

L’ONG UN Watch* a condamné l’adoption de cette résolution. « C’est la dernière salve d’une série de résolutions de l’ONU qui cherchent dangereusement à introduire les interdits islamiques contre le blasphème dans le vocabulaire du droit international », a déclaré son directeur, Hillel Neuer, dans un communiqué. « Les droits de l’Homme ont été conçus pour protéger les individus, pour garantir à chaque personne la liberté d’expression et la liberté de culte, mais certainement pas pour protéger quelque croyance que ce soit, religion comprise », a-t-il ajouté.

Menace pour les femmes

D’un point de vue féministe, l’adoption de cette résolution est inquiétante. Pour soi-disant protéger la liberté de religion et satisfaire les fondamentalistes religieux, l’ONU en viendra-t-il à exiger des États qu’ils interdisent toute critique légitime des religions ? Par exemple, toute critique rappelant qu’aucune religion ne reconnaît dans les faits l’égalité des femmes et que, dans certains pays, des femmes sont emprisonnées et d’autres tuées simplement parce qu’elles réclament la reconnaissance de leurs droits fondamentaux ? Ces propos seront-ils perçus comme du dénigrement pour le Conseil des Droits de l’Homme, comme ils le sont par les islamistes ? Les pays où politique et religion sont intimement liées trouveront-ils dans cette résolution une justification de leurs actes barbares à l’égard des femmes, un motif additionnel pour les emmurer dans le silence comme dans la burqa sous peine de mort ? Ils brandissent déjà les livres sacrés pour justifier l’écrasement des femmes. Qu’on songe, par exemple, aux filles et aux femmes afghanes dont on a brûlé récemment le visage à l’acide parce qu’elles fréquentaient l’école. Qu’on songe aux féministes iraniennes emprisonnées parce qu’elles ont manifesté publiquement et lancé une pétition ("Un million de signatures") pour faire pression sur l’État. La résolution sur la lutte contre le dénigrement des religions sera un instrument de plus entre les mains de leurs tortionnaires.

Les activistes qui taxent d’islamophobie toute critique de l’islamisme et qui estiment alarmiste le fait de considérer que cette résolution puisse nuire aux femmes des communautés concernées sont de mauvaise foi. Contrairement à ce qu’ils prétendent, ils ne considèrent pas que toutes les femmes ont les mêmes droits. Au besoin, ils écartent certains faits ou les ignorent. En juin 2008, une séance du Conseil des droits de l’Homme a été le théâtre d’une foire d’empoigne quand une déclaratipon commune de deux ONG a dénoncé « la lapidation des femmes adultères et le mariage des filles dès l’âge de 9 ans, pratiqués dans les pays ’qui appliquent la charia’ ». Les porte-parole des ONG ont été accusés d’islamophobie et le représentant de l’Égypte a déclaré que « l’Islam ne sera[it] pas crucifié devant ce Conseil ». Le président du Conseil, l’ambassadeur roumain Doru Romulus Costea, a estimé que les propos des ONG étaient des « jugements de valeur » et leur a intimé l’ordre de se taire. Il a suspendu la séance et, à sa reprise, a prévenu : « Je promets que la prochaine fois que l’orateur émettra un jugement de valeur sur une croyance religieuse, loi ou document (religieux), je l’interromprai et donnerai la parole à l’orateur suivant ». Voilà : dénoncer les violences contre des femmes et des filles, c’est un jugement de valeur, pour l’ONU. Et nous devrions croire que cette institution cherche à protéger les droits des femmes ?

À la suite de l’adoption d’une résolution qui fait de toute critique des religions du dénigrement et un délit, comment sera-t-il possible d’aborder devant ce conseil la question de la violation des droits des femmes et de dénoncer les violences qui leur sont faites sans se faire imposer le bâillon ?

Il y a fort à parier, en outre, que dans les pays qui traitent les femmes comme des sous-êtres, ces dernières verront leur situation se détériorer. Et le Conseil des droits de l’Homme portera bien son nom : il s’agit bien de préserver les présumés droits des hommes, à l’exclusion des droits des femmes. Une fois de plus, les religions reprendront ou renforceront leur leadership au sein des sociétés civiles. Les femmes continueront d’être victimes de la violence des institutions, comme au bon vieux temps de l’alliance entre Église et État. L’Histoire est faite de perpétuels recommencements.

 Pour lire cette résolution de l’ONU intitulée "Lutte contre le dénigrement des
religions" (A/C.3/63/L.22/Rev.1), cliquez sur ce lien. Téléchargement en PDF.

Source : AFP, 25 novembre 2008, sous le titre de « L’ONU appelle à empêcher le dénigrement des religions ».

* United Nations Watch est une Organisation Non-Gouvernementale (ONG) qui s’est donné pour mission de promouvoir les droits de l’Homme pour tous et de s’assurer que l’ONU respecte les principes énoncés dans sa Charte. UN Watch.

Mis en ligne sur Sisyphe le 30 novembre 2008



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Micheline Carrier
Sisyphe

Micheline Carrier est éditrice du site Sisyphe.org et des éditions Sisyphe avec Élaine Audet.



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