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vendredi 16 septembre 2011 Hockey, suicide et construction sociale de la masculinité
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Inusité sur Sisyphe, ce sujet surprendra peut-être les lectrices et les lecteurs qui ont des intérêts aux antipodes du hockey et du suicide chez les hommes, dont on nous a rabattu les oreilles depuis des années, avec les atermoiements d’usage sur la détresse masculine dont la responsabilité incomberait aux féministes... En partant d’une analyse de cas de joueurs de hockey qui se sont suicidés pour parler du suicide et de la masculinité, l’auteur confirme ce que des analyses féministes ont déjà souligné : un lien entre la construction sociale de la masculinité et la culture de la violence et de la mort. Parce que cette même construction de la masculinité est aussi à l’origine de nombreuses formes de violence à l’égard des femmes : violence conjugale et familiale, viol, harcèlement, refus de l’égalité en emploi, prostitution, règles religieuses contraignantes imposées aux femmes seulement, et autres, lisons ce qu’en disent les témoignages et l’auteur, qui écrit : « Ces hommes ne sont pas de passives victimes des rôles socialement prescrits ou bien de simples individus conditionnés ou socialisés par leur culture de référence. Ils sont plutôt des agents actifs dans la construction et la reconstruction des normes dominantes de la masculinité. » (Sisyphe)
Wade Belak, joueur de hockey et défenseur des Predators de Nashville a été retrouvé mort dans son appartement de Toronto le mercredi 31 août 2011. Il s’est suicidé par pendaison. Décédé à 35 ans, il a joué 549 matchs dans la LNH avec l’Avalanche, les Flames, les Maple Leafs, les Panthers et les Predators. Il a pris sa retraite en mars dernier. Il était marié et père de deux enfants. Le jour même de son décès, il devait participer à l’émission radiophonique de Bryan Hayes sur les ondes de TSN Radio, mais quand le taxi s’est présenté pour le prendre, il n’y était pas. « Nous avons juste pensé qu’il avait oublié ou qu’autre chose s’était présenté à lui. En ondes, nous devions cependant passer à autre chose, a dit Hayes. De savoir qu’il ne s’est pas présenté parce qu’il était mort est plutôt troublant ». Davantage reconnu pour ses combats que pour ses statistiques, Belak, colosse de 6 pi. 5 po., 222 livres, a marqué huit buts et 25 passes en carrière. Il a récolté 1263 minutes de pénalité. Craig Button, qui était le directeur général des Flames quand Belak y évoluait, a indiqué qu’il était très populaire auprès de ses coéquipiers. « C’était un gars apprécié car sur la glace, il était là pour "livrer les combats", si on peut dire. À l’extérieur de la patinoire, tout le monde l’appréciait parce qu’il était extraverti. C’est difficile à croire, car il semblait être le genre de gars atteint d’un enthousiasme contagieux ». « Nos pensées vont vers les êtres chers de Wade, ses amis, ses ex-coéquipiers et tous ceux qui sentent un terrible vide à la suite de cette tragédie », a indiqué le commissaire de la LNH, Gary Bettman. Belak est le troisième homme fort à perdre la vie en quelques mois, après Derek Boogaard (décédé d’une surdose d’alcool et d’oxycodone administrée par son frère) et Rick Rypien (suicide) (1). Ces informations ont été cueillies dans un article publié par Jean-Mychel Guimond pour CKAC Sports le mercredi 31 août 2011 à 17h31. Modifié à 20h10. (2) Ce nouveau suicide dans le monde du hockey et parmi les joueurs reconnus comme étant des « bagarreurs » porte à réflexion. Peut-on détecter un lien entre la violence sur la glace et le suicide ? Le stress causé par ce type de jeu violent conduit-il à la dépression (3) ? Comment traiter ce genre de dépression ? Quelles sont les services de prévention (4) du suicide offerts par la Ligue du hockey ? Cependant, il ne suffit pas de mettre en place des règlements et des stratégies, des politiques de prévention. Il faut instituer une réflexion en profondeur sur le phénomène de la violence dans les sports en lien avec les structures et les mentalités d’une société, avant de trouver des remèdes souvent insuffisants ou inappropriés. Il faut une réflexion de groupe composé de sociologues et de psychologues, de médecins, d’experts en kinanthropologie, en éthique, en suicidologie. Dans les limites de cet article, nous apportons provisoirement quelques éléments, proches de l’expérience concrète des joueurs eux-mêmes, car il faut commencer cette réflexion à partir de la réalité vécue dans le monde sportif lui-même. Quelles sont les caractéristiques de la détresse des joueurs ? Celle-ci, même si elle prend la forme d’une dépression, n’est pas nécessairement associée à la maladie mentale (5), comme on le laisse supposer trop aisément dans le monde de la psychiatrie, de la psychologie et de la suicidologie, surtout en Amérique du Nord, sans doute pour servir les intérêts des diverses corporations. Détresse des joueurs Commençons d’abord avec des témoignages d’anciens joueurs qui nous ont été communiqués par les médias (6). Une première observation s’impose : les joueurs actuels et les anciens joueurs ont besoin d’aide. Ainsi nous avons pu lire : « Ce sont des joueurs qui faisaient le même rôle que moi durant ma carrière, a dit l’ancien homme fort André Roy. C’est inquiétant et on se pose beaucoup de questions. Notre rôle sur la patinoire n’est pas facile et provoque beaucoup de stress. [...] Ça fait trois décès cette année seulement, mais ça pourrait se reproduire l’an prochain. Je pense qu’il est important d’entourer les joueurs, qu’ils soient sur le premier ou le quatrième trio. Peu importe votre place dans l’équipe, tout le monde peut avoir des problèmes personnels et avoir besoin d’aide. Parfois après la carrière, ça peut être difficile après avoir été au sommet de la gloire. Se retrouver seul du jour au lendemain provoque aussi la déprime chez certains. C’est le temps pour la ligue de trouver des solutions pour ceux qui ont besoin d’aide et s’assurer que l’aide est disponible ». « Je crois de moins en moins qu’il s’agit d’une coïncidence, a déclaré l’ancien joueur Denis Gauthier. Il y a des conséquences à leur mode de vie. Boogard, c’était les prescriptions. C’est un métier très dur. La Ligue nationale devra agir rapidement afin de protéger ses hommes-forts ». (7) Joël Bouchard, le président et directeur général de l’Armada de Blainville-Boisbriand de la LHJMQ a émis ces propos lorsque rejoint par l’Agence QMI : « Je suis sous le choc. Encore un homme fort. Je pense que ça va ouvrir le dossier des commotions cérébrales. Les commotions, c’est une "canne de vers" et je trouve qu’il y a un lien entre ces décès cet été ». Dans un article, au titre évocateur, « Quand j’ai manqué mon suicide, je me suis retiré du hockey ». Stéphane Richer (8), en entrevue, l’ancien joueur du Canadien, a admis qu’il avait sombré dans une dépression qui l’a mené jusqu’à une tentative de suicide (9). Voici son récit : « J’ai vécu ça surtout les années où j’étais à Tampa Bay avec Monsieur Demers. Justement, j’étais avec Jacques la semaine dernière et on parlait de ça. Tout le monde vit ça différemment. C’est très malheureux de voir un incident comme le décès de Rick Rypien, un jeune de 27 ans ». Encore, plus que les commotions cérébrales, le mal de vivre est difficile à diagnostiquer et le milieu "macho" du hockey n’aide pas une personne souffrant de symptômes de dépression à consulter : « J’étais à Tampa et j’étais fatigué mentalement et rien ne fonctionnait. J’avais été échangé de Montréal à Tampa puis à St. Louis en peu de temps. Je me posais beaucoup de questions. Tout allait mal et tout semblait noir. On me disait que j’étais gros, grand et fort et que j’étais un joueur de la Ligue nationale, d’arrêter de me plaindre, que je n’étais pas supposé avoir des problèmes. Le glamour, l’argent, l’entourage... Que tu sois un joueur de hockey ou n’importe quel autre humain, les problèmes, ça fait partie de la vie. Mais, dans notre milieu, on n’est pas supposé de se plaindre ». « Quand tu penses au suicide, c’est épeurant. Moi, je l’ai vécu, j’étais fatigué, admet Richer. J’étais parti dans mon patelin avec ma Porsche. J’ai fermé les lumières de l’auto à 100 milles à l’heure. Je ne sais pas comment j’ai fait pour faire ça. Ce n’était pas mon heure. Tout le monde vit ça différemment. » La mort de Rypien a aussi rappelé celle de Bob Probert à Stéphane Richer : « J’ai eu la chance de côtoyer Probert pendant presque deux mois durant Battle of the Blades. Les gars cherchent de l’aide, mais on met toujours une étiquette sur ces gars-là. Ces gars-là sont tough, mais j’ai appris beaucoup de choses. Je n’ai pas été surpris quand j’ai appris le décès de Probert. Et quand j’ai vu la nouvelle sur Rypien, je me suis rappelé d’un incident l’impliquant au Minnesota quand il avait eu des démêlés avec un partisan. C’est triste, mais dans le milieu du hockey, il y a des gars qui croient qu’ils vont s’en sortir tout seuls. Mais, peut-être aussi que ce jeune-là a dit à des gens qu’il avait du mal à fonctionner et qu’il a demandé si quelqu’un pouvait l’aider ». Richer s’en est sorti, mais pas avant d’avoir touché le fond, et il admet qu’il doit bien s’entourer pour vivre une vie harmonieuse : « En 1998 à Tampa, je ne crois pas que le programme d’aide dans la LNH était aussi élaboré qu’aujourd’hui, poursuit Richer. Je savais que je pouvais m’en sortir. Quand j’ai manqué mon suicide, je me suis retiré du hockey et je me suis consacré aux affaires, Je vis au jour le jour. Des gars vont parler de leur temps difficiles et ça surprend encore les gens. Mais, un joueur de hockey, c’est d’abord un être humain. J’ai été chanceux et j’ai eu des bonnes personnes autour de moi. J’ai aussi dû couper des ponts avec beaucoup de gens qui ne me donnaient rien. Pour avancer et fonctionner, je dois m’entourer de bonne énergie. J’ai parlé avec Jacques Demers il n’y a pas longtemps en lui disant que tout allait bien pour moi. Ma business va bien et j’aime représenter le Canadien », a souligné Richer qui était à Rivière-du-Loup pour participer à un tournoi de golf. (10) Premières lectures des faits et événements Le journaliste Napoléon Labeaume tente de relativiser le phénomène du suicide parmi les joueurs de hockey. Pour commencer, il affirme que Derek Boogard ne s’est pas suicidé, mais qu’il a été tué par son frère actuellement sous enquête, pour lui avoir donné de l’oxycodone, non prescrite mêlée avec de l’alcool (11) ayant eu la mort comme résultat.Toujours d’après Labeaume, un footballeur est mort justement quelque semaines avant le décès de Wade Belak, et le lutteur Test pour ceux qui suivent la WWE, sont mort à cause de ce même mélange. Le grand mérite de Labeaume, c’est d’avoir pris la décision de faire des recherches sur les décès des joueurs de hockey à partir de 1912 jusqu’à aujourd’hui. Il parvient aux résultats suivants : En 100 ans, 12 sont mort d’un accident d’auto (14 si on inclut ceux de moto) Là où le bât blesse, c’est que l’auteur de cette recherche fort utile en tire la conclusion que, pour mieux encadrer les joueurs, il faudrait leur enlever leur permis de conduire, car de toute évidence, les joueurs de la NHL ne savent pas conduire.(12) Or, l’on sait que la vitesse au volant (13), conduite jugée extrême, est comptée parmi les comportements suicidaires. La noyade figure parmi les moyens (14) de suicide les plus utilisés. L’alcoolisme est aussi une forme de dépression qui mène souvent au suicide. Le comportement violent sur la patinoire est, en lui-même un geste agressif contre autrui qui peut conduire à l’homicide ou également au suicide en tant qu’agressivité à l’égard d’autrui retournée contre soi, opinion clairement exprimée par Sigmund Freud (15). Les témoignages des joueurs, entraîneurs, dirigeants et journalistes sportifs devraient être cueillis, analysés et interprétés. Des analyses qualitatives pourraient avoir pour objet du matériel biographique rendu public dans les médias sous forme d’entrevues ou déclarations spontanées, comme nous en avons citées ci-dessus. Ce long travail préalable est indispensable pour l’évaluation du risque suicidaire, la mise en place de directives à ce sujet dans les clubs et les ligues et, dans le domaine psycho-social, pour l’organisation de la prévention du suicide et de l’éducation des sportifs. Et cela en fonction de l’établissement d’une culture sportive orientée vers l’épanouissement de la personne humaine selon toutes ses potentialités à l’intérieur des limites de son être bien et de son vivre bien ensemble, en communauté avec autrui. C’est un long travail qui s’impose comme une urgence. Les responsables sportifs, les dirigeants des ligues et des clubs devraient être choisis uniquement parmi des personnes qui ont acquis cette culture humaniste, selon des critères à établir, loin des intérêts bassement financiers sans âme ni conscience. Autres suicides dans les sports Ces études pourraient être élargies et inclure les suicides dans le monde sportif en général : joueurs, directeurs et entraîneurs. Les médias rapportent que Jeter Peterson, vice champion olympique en ski stylelibre lors des JO de Vancouver 2010, s’est donné la mort à l’aide d’une arme à feu. Il a été retrouvé dans un ravin par la police de l’Utah. Il était connu pour être dépressif (16). Âgé de 29 ans, il avait été accusé de conduite en état d’ivresse et avait plaidé non coupable. Jeter Peterson était connu pour avoir été exclu des JO de Turin en 2006 après une bagarre alors qu’il était en état d’ébriété. Mais il avait surtout marqué les esprits pour avoir manqué de peu l’or olympique en 2010 à Vancouver. Le skieur américain s’était contenté de l’argent, affirmant qu’il s’agissait « du plus beau jour de sa vie ».(17) Alain Vogin, nouvel entraîneur des Ducs d’Angers, est décédé le 15 août 2010. Il avait joué de 1996 à 2001 chez les Ducs d’Angers avant de partir à Rouen où il avait remporté deux titres de champion de France, en tant que joueur puis en tant qu’entraîneur. Le hockeyeur international Alain Vogin s’est donné la mort, un samedi après-midi à Angers. En 2009, il avait entraîné l’équipe de Vallpelice, en Italie. Expérience qui s’était soldée par un échec. Mickaël Juret, le président de la section pro des Ducs d’Angers, lui avait alors demandé de revenir entraîner l’équipe. Compagnon d’une Angevine, Alain Vogin était le père d’un bébé de neuf mois. (18) L’Encyclopédie sur la mort, dans la section des « suicidés illustres », fait mention des cyclistes belges suicidés Dimitri De Fauw et de Frank Vandenbroucke, du footballeur allemand Robert Enke et du nageur québécois Jean-François Bergeron*. (19) Jusqu’à présent, nous avons présenté des faits - le suicide de quelques joueurs - et des témoignages - des joueurs racontant leurs propre expérience de tentative de suicide ou des entraîneurs ou des directeurs sportifs ayant leur propre regard sur le suicide de jeunes joueurs. Il nous faudrait recueillir davantage de ces témoignages pour ensuite les analyser et les interpréter. Ce travail reste à faire. Certaines pistes sont à explorer. Des modèles de la construction sociale de la masculinité Des travaux de recherche ont été accomplis au sujet du phénomène de suicides d’hommes. Parmi ceux-ci, il y en a une étude qui mérite d’être examinée de près. C’est le mémoire de maîtrise en sociologie de Philippe Roy, La négociation des normes masculines par les hommes en crise suicidaire, Montréal, Université du Québec à Montréal. Ce mémoire explore « le processus par lequel les hommes, qui traversent une crise suicidaire, effectuent une négociation avec les normes de la masculinité » (p. VII). L’auteur a interviewé neuf usagers du service d’hébergement d’aide pour personnes suicidaires. Ce ne sont ni des personnes qui ont accompli leur suicide, ni des sportifs de haut niveau, mais ils ont en commun d’avoir vécu l’expérience de la dépression, des idéations suicidaires, mais ont aussi attenté à leur vie. L’auteur a privilégié l’approche socio-constructiviste en analysant les comportements des hommes, en crise suicidaire, à partir des rapports que ceux-ci ont établis avec les normes culturelles de la masculinité, dans lesquelles ils ont été formés et auxquelles ils ont obéi, depuis leur enfance jusqu’à l’heure de leur décision suicidaire, mais aussi à partir de leur manière de se situer à l’égard d’une demande d’aide. Ces hommes ne sont pas de passives victimes des rôles socialement prescrits ou bien de simples individus conditionnés ou socialisés par leur culture de référence. Ils sont plutôt des agents actifs dans la construction et la reconstruction des normes dominantes de la masculinité. Dans ce contexte, P. Roy (p. 38) cite S. Syncott « qui met en lumière les dimensions universelles et les particularités propres à différentes cultures au sujet de la masculinité » et qui souligne « la place prépondérante qu’occupent la bravoure, le stoïcisme et le contrôle émotionnel dans l’attitude attendue du guerrier ». L’imaginaire collectif de la masculinité exerce une forte pression sociale « pour que les hommes se conforment à l’image du travailleur acharné, autonome et responsable. Plus que tout, le héros constitue probablement le modèle masculin le plus fort, le plus valorisé et le plus répandu à travers les cultures . » (20) Le modèle le plus courant, véhiculé par les règles de la masculinité, est celui d’homme « fort, silencieux, stoïque et indépendant » ; « non-communicant, compétitif, peu généreux et inexpressif ». Les caractéristiques de l’image masculine socialement prescrite sont « l’agressivité, la compétitivité, la domination, les prouesses sexuelles et athlétiques, le contrôle et le stoïcisme ». L’attitude stoïque consiste à endurer sa souffrance sans la manifester extérieurement. Un homme « doit agir différemment des femmes à chaque occasion. Être supérieur aux autres : ce qui exige une attitude compétitive plutôt que coopérative. Être un arbre robuste : l’homme doit être une personne indépendante et ne se fier qu’à soi, autant que possible. Écraser ses compétiteurs : le succès d’un homme réside dans sa capacité à dominer les autres. Pour ce faire, la violence, l’hostilité et l’agression tendent à faire partie de son mode de vie » (P. Roy. o.c., p. 39). Au sommet de la masculinité se trouve la masculinité hégémonique, porteuse « de la signification et de la manière dont un homme doit opérer les relations sociales avec les femmes et avec les autres hommes. La masculinité hégémonique encourage la suppression des émotions, la violence, la compétition, la prouesse athlétique et sexuelle, le contrôle (de soi et de l’environnement), le stoïcisme, la prise de risques, la consommation abusive d’alcool et rend obligatoire le rôle de pourvoyeur. (21) La peur d’être contrôlé par les autres et le déni de la vulnérabilité engendre chez l’homme le refus de l’aide. Se considérant le protecteur de la famille, du clan ou des faibles, il est porté vers l’action et l’autonomie. Il exprime sa souffrance par le silence et la colère. Les entrevues que P. Roy a menées avec des hommes en thérapie pour crise suicidaire lui ont permis de dégager un modèle de leur processus de crise suicidaire. Ce processus débute par l’expérience de problèmes personnels envahissants et perçus comme insolubles. Sont identifiées comme causes de la crise suicidaire : 1) les pertes d’emploi et de revenu, 2) les pertes familiales, 3) la solitude, 4) les problèmes de santé physique, 5) les dépendances à l’alcool, aux drogues, au jeu et la dépendance affective (o.c., p. 118). « Le vrai gars est donc ici défini par sa performance sociale et sexuelle. Le travail est également identifié comme une activité où s’exprime la masculinité et comme une valeur transmise par le père. [...] Le discours social du vrai gars est grandement alimenté par la publicité et les productions médiatiques » (o.c., p. 121). Ce modèle de la masculinité, offert aux hommes, se reflète aussi dans leur manière de vivre la dépression et de se comporter au sein de leur crise suicidaire. Cette même éthique se retrouve également chez le sportif en regard de sa profession et des tâches qui lui sont attribuées à l’intérieur de son équipe. Les impératifs du courage et de la force, de la souffrance silencieuse ainsi que la peur et la honte de se monter vulnérables et fragiles, le devoir d’être supérieur aux autres dans le combat les empêchent de sortir de l’étau de leur détresse et de demander de l’aide. La tâche qui nous reste à faire, c’est de donner la parole aux sportifs eux-mêmes, joueurs, entraîneurs et directeurs d’équipes et de rassembler leurs témoignages. À partir de leurs récits, nous tenterons d’interpréter la crise suicidaire des joueurs et des athlètes, de connaître les sources de leur détresse et de leur désarroi afin de prévenir, si possible, des morts prématurées et des souffrances inutiles, et, d’assainir, si possible, le milieu des sports, et finalement de transformer la culture du sport et la mentalité des supporters et des fans, construites sur le modèle de la masculinité hégémonique où l’agilité athlétique cède la place à la force brute. Bibliographie F. Dupuis-Déry, « Le chant des vautours : de la récupération du suicide des hommes par des anti-féministes » dans M. Blais et F. Dupuis-Déri, Le mouvement masculiniste au Québec. L’anti-féminisme démasqué, Montréal, Les éditions du remue-ménage, 2008, p. 145-177. Notes 1. "Rick Rypien", Encyclopédie sur la mort. © Éric Volant, le 7 septembre 2011. Article publié dans La mort par groupes sociaux > Catégories ou groupes de personnes, dans l’Encyclopérie sur la mort de l’Encyclopédie de l’Agora, pour un monde durable, qui contient des ressources documentaires inestimables. Nous remercions l’auteur de partager son analyse avec les lectrices et lecteurs de Sisyphe. Mis en ligne sur Sisyphe, le 13 septembre 2011 |