Yasmine Mohammed connaît bien tous les préceptes de l’islam, jusqu’à celui qui dicte comment un musulman doit se couper les ongles. Née au Canada d’une mère égyptienne, elle parle arabe et peut citer de mémoire le verset qui permet au mari de frapper sa femme « si elle lui désobéit ».
Yasmine a grandi à Vancouver dans un milieu musulman intégriste, soumise à la cruauté de sa mère et aux violences de son beau-père, dont sa mère était la deuxième épouse. Si la bigamie est interdite au Canada, cela n’empêche pas certains musulmans d’avoir plusieurs épouses en vertu de la charia. « Bien sûr, c’est caché aux autorités, mais c’était bien connu et tout à fait accepté dans le milieu où j’ai grandi ».
Dans son ouvrage autobiographique, Lever le voile ou comment les progressistes occidentaux favorisent l’islam radical, paru récemment chez Jet Bleu Éditrice, elle raconte son enfance marquée par des contraintes religieuses et des sévices inimaginables. Elle doit se lever avant l’aube pour réciter la première prière du jour et, si elle se trompe, son beau-père la frappe. La jeune Yasmine n’a pas le droit de fréquenter les kouffars, ces non-musulmans que sa mère méprise, et subit un endoctrinement quotidien dont la haine des Juifs est un pilier. À neuf ans, sa mère l’oblige à porter le hijab, ce foulard que Yasmine déteste, comme la plupart de ses camarades musulmanes. De nature curieuse, elle questionne sa mère sur des dogmes religieux qui lui semblent insensés, ce qui lui vaut des injures et des coups.
Trahie par la justice canadienne
La jeune Yasmine est profondément malheureuse et se confie un jour à un enseignant qui a remarqué les marques qu’elle porte. D’une force de caractère peu commune, l’adolescente décide de porter plainte contre ses parents dans l’espoir d’être retirée de son milieu. Devant le tribunal de protection de la jeunesse, elle décrit en détail les violences et les abus sexuels que son beau-père lui inflige. Après avoir entendu son témoignage, le juge déclare que les châtiments corporels ne sont pas interdits au Canada et que « dans votre culture, ils peuvent être plus sévères qu’au sein d’un ménage canadien moyen ». À son grand désarroi, il la renvoie chez ses parents, qui lui feront payer très cher d’avoir osé faire appel à des mécréants.
Yasmine se sent horriblement trahie. Elle écrit avec amertume « Dans son obsession pour la tolérance et la diversité culturelle, le Canada a fini par se montrer discriminatoire envers moi. Si j’avais grandi dans une famille blanche, j’aurais à coup sûr été protégée ». Encore aujourd’hui, le relativisme culturel la dégoûte : « Ce deux poids, deux mesures est intolérable, injustifiable. Et toujours en vigueur au Canada. Combien d’enfants ont été ignorés ou rejetés dans la fosse aux lions comme je l’ai été ? ».
Anéantie par ce jugement, Yasmine perd tout espoir de s’en sortir, et même le goût de vivre. « Il ne me restait plus aucune combativité, écrit-elle. Avec l’assistance du système judiciaire de la Colombie-Britannique, ma mère avait réussi à me briser ». Quand on l’oblige à porter le voile intégral, elle n’a plus la force de résister. Revêtue d’une longue robe noire et d’un voile qui recouvre même ses yeux, elle se sent dépérir. « J’avais l’impression d’être emprisonnée dans un sarcophage et d’y mourir d’une lente asphyxie. » Elle ne résiste pas non plus quand sa mère choisit pour elle un mari « capable de la mater ». Cet homme, qui la brutalise et la garde littéralement enfermée à la maison, s’avérera un membre d’Al-Quaïda.
Relativisme culturel et aveuglement de la gauche.
Après des années de quasi-captivité, Yasmine réussit à échapper à son mari, qui sera incarcéré en Égypte pour terrorisme. Elle renie l’islam, quitte sa famille et s’enfuit avec sa fille pour s’établir ailleurs sous un autre nom. Elle reprend ses études et, après des années très difficiles, trouve un travail. Heureuse de pouvoir enfin mener une vie normale, Yasmine ne révèle à personne les horreurs qu’elle a subies aux mains de ses parents intégristes.
Mais un jour, c’en est trop. Yasmine n’en peut plus du relativisme culturel qui gangrène le Canada et tout l’Occident, particulièrement les milieux qui se veulent de gauche. Après avoir longuement hésité, elle décide de raconter son histoire, en sachant très bien ce à quoi elle s’expose. En tant qu’apostate, elle mérite la mort selon la charia. De surcroît, elle ose critiquer l’islam. Yasmine craint pour sa vie mais aussi pour la sécurité de sa famille (elle s’est remariée et a maintenant deux filles), mais elle refuse de céder à la peur. Ses prises de position lui valent un torrent de menaces, qui redoublent de violence après l’attentat contre Salman Rushdie. Pendant sa récente tournée au Québec, des mesures de sécurité exceptionnelles ont dû être prises pour la protéger.
Comme les maisons d’édition refusent de publier son récit, craignant pour leur sécurité, elle le publie à compte d’auteure, sous le titre Unveiled - How Western Liberals Empower Radical Islam. Dans cette autobiographie courageuse, elle témoigne des ravages de l’islamisme au Canada et dans l’ensemble des démocraties occidentales. Yasmine Mohammed est une des premières voix en Amérique du Nord à dénoncer la complaisance des élites progressistes à l’égard de l’intégrisme musulman et leur silence coupable devant le traitement qu’il réserve aux femmes et aux enfants.
Venir en aide aux victimes de l’intégrisme musulman.
Depuis la parution de son livre - devenu un best-seller et traduit jusqu’ici en quinze langues - elle reçoit d’innombrables témoignages de jeunes musulman.es ou ex-musulman.es du monde entier qui se reconnaissent dans son récit. Émue par ces messages de femmes et de personnes homosexuelles opprimées dans des pays à majorité musulmane, elle fonde l’organisme Free Hearts, Free Minds pour leur venir en aide (1). Cet organisme offre aux victimes de « traumatisme islamique » (islamo-trauma) un soutien psychologique et des services de psychothérapie.
Yasmine souhaite aussi insuffler de l’espoir aux musulmanes assujetties aux volontés de leur famille dans des pays occidentaux. Elle crée pour cela le podcast Forgotten Feminists, dans lequel elle s’entretient avec des ex-musulmanes qui ont réussi à se libérer de l’emprise de leur entourage, parfois au prix d’immenses efforts (2). Les récits de ces femmes pourtant nées en Occident sont stupéfiants.
En 2017, une députée du gouvernement de Justin Trudeau propose une motion condamnant l’islamophobie. Devant le comité parlementaire chargé d’en débattre, Yasmine Mohammed déclare que ce mot est une imposture. Dans les pays occidentaux, dit-elle, le mot « islamophobie » est l’arme utilisée par les islamistes pour faire taire les critiques de l’islam, même les plus légitimes (3). La motion sera néanmoins adoptée.
La laïcité de l’État : rempart contre la montée de l’islamisme.
Yasmine Mohammed s’inquiète des avancées de l’islam politique dans nombre de pays démocratiques. Elle rejette tout empiètement des particularismes religieux sur les règles de vie communes. Dans un message sur Twitter, elle se déclare en faveur de la Loi sur la laïcité de l’État au Québec, estimant que la laïcité facilite le vivre ensemble (4). Elle s’oppose ainsi au puissant Conseil national des musulmans canadiens (CNMC), qui figure au nombre des intervenants qui contestent devant les tribunaux cette loi dûment adoptée par le gouvernement du Québec.
Le récent lancement de la version française de son livre a coïncidé avec le début des manifestations des Iraniennes contre le hijab obligatoire. Cette « révolution des femmes » aurait jusqu’ici coûté la vie à plus de 400 personnes, mais malgré la répression féroce du régime iranien, qui détient actuellement plus de 15 000 personnes et menace de les exécuter après des simulacres de procès, la révolte ne faiblit pas. Les Iraniennes continuent à circuler tête nue et à braver les interdits en dansant et en chantant dans les rues. Leur extraordinaire courage, alors qu’elles risquent la prison, la torture et même la mort, a ému l’opinion mondiale et suscite une admiration mêlée d’inquiétude, de même qu’une vague de solidarité planétaire. Nul ne peut prédire quelle sera l’issue de ce qui est devenu un soulèvement populaire contre la théocratie iranienne.
Le combat des Iraniennes contre le hijab, symbole de leur asservissement.
Le voile islamique est au cœur de la révolte des Iraniennes contre les ayatollahs misogynes qui réglementent tous les aspects de leur vie. Quand on voit la rage avec laquelle ces jeunes femmes piétinent, déchirent ou brûlent leur hijab, on comprend mal pourquoi, au Québec et ailleurs, des femmes qui se réclament du féminisme intersectionnel justifient ce symbole d’infériorisation des femmes et défendent pour les musulmanes le droit de le porter en tout temps et en tout lieu. Certaines vont jusqu’à le célébrer lors de la Journée internationale du hijab, où l’on pousse l’absurdité jusqu’à inviter des non-musulmanes à le revêtir.
D’ordinaire posée, Yasmine s’enflamme quand elle évoque « ces féministes qui n’en sont pas », celles qui revendiquent pour les femmes d’autres cultures le droit de s’humilier en arborant ce symbole misogyne, ce qu’elles n’accepteraient jamais, ni pour elles-mêmes, ni pour leurs filles. « Comment ces pseudo-féministes, qui dénoncent haut et fort la culture du viol, peuvent-elles ne pas voir que le hijab relève de la culture du viol ? Cela saute aux yeux ! On dit aux musulmanes de se couvrir les cheveux pour ne pas attiser le désir des hommes, sinon ce sera de leur faute si on les agresse. » Yasmine se demande pourquoi ces féministes occidentales ne se montrent pas plutôt solidaires des musulmanes progressistes qui dénoncent les exigences religieuses rétrogrades. Hypocrisie ? Aveuglement volontaire ? Peur de se faire traiter d’islamophobe ? Elle s’interroge : « Comment peut-il être possible de combattre le patriarcat occidental ET de soutenir le patriarcat islamique EN MÊME TEMPS ? ».
Cette incohérence n’échappe pas aux féministes universalistes, qui revendiquent les mêmes droits pour toutes les femmes, quelle que soit leur origine ethnique ou leur appartenance religieuse. Convaincues de la profonde misogynie des religions monothéistes, elles soutiennent que l’État doit être laïc et servir de rempart contre les particularismes religieux, et non pas en faire la promotion au nom du multiculturalisme, sacrifiant au passage les droits des femmes issues de certaines communautés.
En ayant le courage de raconter son histoire personnelle et de dénoncer les injustices faites aux musulmanes au nom de la charia partout dans le monde, Yasmine Mohammed lance un appel aux femmes des pays où l’égalité des sexes est inscrite dans les lois. Elle nous engage à faire preuve d’esprit critique face à l’islam, à en dénoncer la misogynie et à nous montrer solidaires de nos sœurs qui se battent pour leur liberté au péril de leur vie dans les pays musulmans.
On peut se procurer le livre de Yasmine Mohammed en communiquant avec Johanne St-Amour, à : Courriel Notes
1. En français, Cœurs libres, esprits libres. https://www.freeheartsfreeminds.com/.
2. En français, Féministes oubliées. Voir le cas d’Ellaf. Lire
3. Lire
4. Extrait en anglais. Lire