Ou comment transformer ce 25 novembre 2011 en plaidoyer contre les violences faites aux hommes
Nous revenons ici sur l’exposé du sociologue ci-dessus nommé, invité le lundi 21 novembre 2011, au forum de l’IRTS de Lorraine à Nancy. Dans le cadre de la prévention des violences faites aux femmes, les étudiant-es promis-es à des carrières dans le domaine social, étaient convié-es à réfléchir à l’intervention sociale auprès des hommes.
Nous l’avons écouté, effaré-es, s’évertuer à clamer que les hommes violents sont avant tout des victimes, perdus sans leurs privilèges de dominants, des hommes ordinaires que le système et certaines femmes malmènent.
En résumé, pour prévenir les violences faites aux femmes, l’intervention sociale auprès des hommes revient à les déculpabiliser et à les déresponsabiliser. Cherchez l’erreur.
Afin d’apporter une contradiction à son discours, orienté pour le moins, il nous a été impossible de l’interroger sereinement le jour de la conférence, tant il est vrai que le niveau de maîtrise de soi exigé était élevé.
Alors, reprenons les quelques arguments entendus, ce 21 novembre, dans l’enceinte d’un établissement de formation, il faut le souligner.
Du maternage des hommes
Dès le début de son exposé, il a situé son intervention d’homme éclairé grâce à des femmes, qui plus est, des féministes. « Tous les hommes n’ont pas eu cette chance ». Quelle galanterie ! Nous le rejoignons dans l’hommage à toutes les femmes, qui œuvrent pour faire des hommes des êtres civilisés.
Cependant, dans un souci d’honnêteté intellectuelle, DWL aurait dû rappeler que les hommes étant des individu-es comme les autres, sont aussi capables de s’interroger par eux-mêmes, sans attendre de leurs mères, sœurs, tantes, cousines, copines, maîtresses, concubines, médecins, juges, avocates, institutrices, qu’elles le fassent pour eux.
* Nous accusons DWL de minimiser la responsabilité individuelle des agresseurs.
De la victimisation des hommes
Dans les représentations sur les violences sexistes que DWL appelle à déconstruire, il évoque les hommes victimes de l’autre sexe, violences chiffrées entre 5 et 15%.
Le fait que ces victimes soient minoritaires ne doit pas les exclure des dispositifs d’aide, de soutien et d’accompagnement des victimes, cela va de soi.
Cependant, en tant qu’« expert », DWL aurait dû compléter la statistique par une analyse, une explication de chiffres, ce qu’il n’a pas fait. Par son silence, il rend invisible une pratique différenciée de la violence ; différenciée par la socialisation et non par des qualités intrinsèques. Ainsi, les femmes utilisent la violence en grande partie comme moyen de défense et non comme moyen de pression et de domination, à l’inverse des hommes. D’après l’OND (Observatoire national de la délinquance), dans les trois quarts des cas de meurtre du conjoint, ces hommes battaient leur compagne.
Les violences faites aux hommes par des femmes existent, minoritairement : par contre, elles ne constituent pas, pour la plupart, les manifestations d’un même phénomène.
* Nous accusons DWL d’opposer les victimes entre elles.
De l’errance des hommes
Ce monsieur hiérarchise les violences en opposant des actes graves aux « simples violences verbales » et psychologiques.
Cependant, en tant que « spécialiste », DWL aurait dû rappeler que les violences verbales et d’ordre psychologique TUENT. Les injures et le mépris répétés, la dévalorisation encore et toujours, jusqu’à épuisement ultime mènent à la mort.
* Nous accusons DWL de minimiser certaines violences faites aux femmes.
Du suicide des hommes
Une preuve du mal-être des hommes : leur suicide. Nous n’allons pas épiloguer, lisez cet article du site Sisyphe.
Le taux de suicide chez les hommes est supérieur à celui chez les femmes. Certes. C’est un problème de santé publique. Bien sûr. Et le double drame pour ces hommes réside dans l’inscription de ce phénomène dans une organisation sociale patriarcale construite par les hommes pour les hommes.
Mais qu’apporte cet élément dans la prévention des violences faites aux femmes ?
* Nous accusons DWL d’opposer les souffrances des un-es à celles des autres.
Des réponses à adapter aux hommes violents
DWL critique les comparutions immédiates et les lieux de privation de liberté, un système répressif selon lui inapproprié à certains hommes violents. Pourquoi réserver ce constat pour les seuls hommes violents ? Pourquoi ne pas englober tous et toutes les individu-es transgressant la loi, toutes victimes de cette même organisation sociale patriarcale ?
Quant à l’offre de service du système carcéral, nous invitons DWL à en débattre dans les espaces et lieux dédiés à cet effet.
* Nous accusons DWL de remettre en cause les dispositifs de protection et le droit à réparation des femmes violentées.
Un dernier exemple de la dangerosité des propos de cet individu : oser revendiquer que « le sperme c’est bon !! » dans une intervention en vue de prévenir les violences faites aux femmes, alors que le viol impose à 75 000 femmes par an un contact forcé au sperme, c’est juste pervers.
Alertée sur le parcours ambivalent du personnage, l’association LesBienNées a interpellé le forum de l’IRTS la veille et demandé l’annulation de la conférence. On nous a répondu par leur intérêt à étudier la masculinité. Le nôtre est de relayer les souffrances de milliers de femmes, victimes d’hommes violents dans toutes les sphères de la vie sociale. Et la parole de ces femmes, si difficile à faire entendre aujourd’hui encore, a été bafouée de nouveau ce soir au forum IRTS de Nancy. C’est tout à fait intolérable.
A lire :
Daniel Welzer-Lang, faux ami du féminisme.
Attention danger masculinisme
Le suicide des hommes, une problématique qui ne date pas du 21e siècle
Association LesBienNées
Association Lesbienne & Féministe
BP n° 92237 - 54022 Nancy Cedex
Mis en ligne sur Sisyphe, le 10 décembre 2011