Six organisations, d’origines différentes dans le paysage associatif lyonnais, ont organisé les 27 et 28 mai des conférences sur les thèmes "Patriarcat : prostitution, pédocriminalité et intégrismes". Ce sont : le Mouvement du Nid, délégation du Rhône ; Femmes solidaires ; le Collectif Libertaire Anti-Sexiste (CLAS) ; le Groupe Kronstadt de la Fédération Anarchiste ; Amicale du Nid (AdN) ; Femmes contre les intégrismes (FCI). Pour plus de renseignements relatifs à ces associations et aux participantes et participants à ces conférences, voir le fichier intégral des Actes du colloque en bas de cette page.
Voici les introductions et grandes lignes d’un bilan pour les trois conférences.
. Introduction de la Table ronde sur la prostitution
On a l’habitude d’enfermer le phénomène de la prostitution dans une fatalité : "plus vieux métier du monde", "on ne la fera jamais disparaître" ; elle obéirait à des injonctions de la nature concernant la sexualité masculine ! La prostitution servirait les besoins de la société d’en protéger le plus grand nombre de ses membres, en sacrifiant un petit reste ayant accepté de se perdre pour le bien des autres. Ce serait l’ordre normal de ce monde !
Vision falsifiée et hypocrite. Les témoignages qui suivront le démontreront.
Le patriarcat est une imposture ; c’est une ruse du plus fort construite pour imposer ses privilèges et, par eux, les inégalités femme-homme.
C’est un énorme business engraissant le sol de notre libéralisme super marchant : 3,2 milliards d’euro de chiffres d’affaires en France. À l’échelle du monde, des millions de personnes y sont englouties. Toujours les plus précaires, les plus faibles !
C’est une criante négation d’une société équilibrée et juste. C’est un système pervers et cynique, fruit d’une complicité collective, la nôtre : préjugés, indifférence, appât du gain, culture du machisme…
Il est temps d’en apprendre plus de celles qui la connaissent pour en avoir souffert.
. Introduction à la table ronde sur la pédocriminalité
L’inceste, et plus largement la pédocriminalité, est un sujet médiatisé mais aussi, paradoxalement, occulté en ce qui concerne l’analyse de ses tenants et de ses aboutissants.
Il s’agit de crimes, particulièrement destructeurs contre la personne de l’enfant et de l’adulte qu’il deviendra s’il survit, avec toutes les difficultés, les blessures, que cette "survivance" implique pour le devenir de l’être. Nous accueillons d’ailleurs ce soir parmi les intervenantes trois personnes survivantes.
L’inceste est un viol, et c’est un "viol institué" : dans la société patriarcale, l’enfant est envisagé comme un enjeu (et ceci historiquement, si nous songeons à la transmission, à l’héritage dans un système qui se fonde sur les deux piliers que sont la propriété et la famille). L’enfant peut alors apparaître comme un objet potentiel, et l’inceste comme l’une des institutions qui, comme les autres formes de viols (viols conjugaux et tarifés, principalement) soutiennent et pérennisent le système.
Mais nous essaierons aussi d’étendre cette réflexion à l’ensemble des crimes sexuels commis contre les enfants, et de voir en quoi ils participent d’un continuum qui fonde une certaine conception des relations humaines et sociales :
– les mariages forcés : ils sont souvent contractés durant l’enfance de la victime. Celle-ci est fréquemment vendue à un parent proche, presque toujours beaucoup plus âgé qu’elle. (Actuellement 700 000 femmes et petites filles environ sont en situation de mariage forcé).
– nous aborderons les agressions sexuelles durant l’enfance en général, et nous verrons qu’un lien existe entre ces agressions durant l’enfance et le système prostitutionnel (l’âge moyen d’entrée dans la prostitution étant de 14 ans, et les personnes prostituées ayant très souvent été des enfants victimes d’agressions sexuelles).
– nous interrogerons également le lien direct entre ces situations d’agression vécues par les enfants et la place que le système patriarcal
. Introduction de la table ronde à propos des intégrismes
Les intégrismes, c’est-à-dire la volonté d’appliquer à la lettre des préceptes religieux archaïques, trouvent leur origine dans le système patriarcal et participent à son maintien par leurs dogmes et leurs lois misogynes, par la violence qui en résulte, par la justification mystique de cette violence et par la volonté politique d’imposer ces dogmes, ces lois et cette violence à toute l’Humanité. Il faut donc placer l’égalité entre les femmes et les hommes au cœur de la laïcité. Il ne s’agit évidemment pas de stigmatiser les croyant-e-s modéré-e-s qui considèrent manifestement que leur foi relève de leur intimité et prennent clairement position en faveur de la laïcité. Mais il ne s’agit pas non plus de nier le fait que le blasphème, et plus largement la critique des religions en tant qu’idéologies et en tant qu’institutions sont, non seulement, des droit fondamentaux mais aussi des œuvres nécessaires pour que la laïcité soit vivante et garde tout son sens.
. Bilan du colloque : grandes lignes
Les 27 et 28 mai 2016, nous avons organisé à Lyon le colloque intitulé "Patriarcat - Prostitution, pédocriminalité et intégrismes", sous la forme d’une table ronde sur chacun des ces thèmes (trois tables rondes) ainsi qu’un concert anarkopunk féministe.
Les intervenantes de nos tables rondes, survivantes, militantes et chercheuses ont réussi, bien au delà de nos attentes, et ce de façon très complémentaire, à mettre en évidence les liens conjoncturels et structurels ainsi que l’origine commune dans le système patriarcal entre la prostitution, la pédocriminalité et les intégrismes religieux. Elles ont ainsi réussi à rappeler, avec conviction, talent et pédagogie, les bases fondamentales du féminisme qui, depuis quelques années, sont violemment attaquées par les lobbys du relativisme culturel et de l’industrie du viol.
Sans tomber, ni dans l’infantilisation des femmes, ni dans l’injonction à la maternité, les intervenantes de la table ronde relative à la pédocriminalité ont démontré à quel point l’oppression patriarcale concerne aussi les enfants, d’où la nécessité d’inclure la lutte pour leur défense et leur protection dans nos analyses et nos combats féministes.
Les débats avec le public furent riches, constructifs et pacifiques. L’ambiance générale était sereine et paisible.
Ce colloque aura été l’occasion de créer des rencontres et tisser des liens entre des personnes, des organisations et des idées, affiner et alimenter nos analyses, découvrir et continuer à construire ce qui nous rassemble : le rêve lucide de construire ensemble une humanité sans domination.
Merci à Atika Bouriah, Chahla Chafiq, Élisabeth Claude, Jeanne Cordelier, Geneviève Duché, Rosen Hicher, Noëlle Navarro, Maudy Piot, Delphine Reynaud, Mélusine Vertelune, au groupe Vizcacha Rebelde et à Thérèse Rabatel.
Merci aussi à toutes les personnes et organisations qui ont relayé l’information relative à notre colloque.
Et enfin merci à toutes celles et ceux qui sont sont venu-e-s.
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