Les mille et une secondes
à ne pas être voulue, à arriver comme un cheveu tombé dans la soupe au rire jaune, l’enfant fille moins utile, il n’est pas un elle, la surpopulation et son lot de trop.
Les mille et une minutes
à être ignorée, à ne pas exister dans le regard du père, du frère, ou pire, de la mère, arrange-toi toute seule fille, débrouille-toi, mais sers à tout, sers-nous.
L es mille et une heures
à à être mal payée, salaire égale fesses à l’air, t’es ben cute, montre-moi ton cul, vends-le au plus sacrant, partage-le donc, ton ventre aussi tant qu’à être dans le trafic, on va le louer pas cher, pas cher.
Les mille et une journées
à errer sans feu ni lieu, sans attaches ni frontières, réfugiée de nulle part, la à folle à lier, l’hystérique de service amputée des mains, la gelée au cœur trop chaud, l’écorchée vive de l’itinérance, la chair à canon d’homme.
Les mille et une nuits
à être épiée, traquée, l’étouffée du prédateur, l’étranglée du cri de secours, la dénudée sans consentement qu’on toisera à coup de tu mens, la laissée pour morte au fond du lit, du truck, du parc-école, de la ruelle aux échos de marelle.
Les mille et une années
de l a mal mariée, mal baisée, mal aimée, de la voile-toi tentation, du coupe-toi plaisir, excise-toi jusque dans le cerveau, excuse-toi pour la vie, tais-toi à mort.
Les mille et une décennies
de la journée de la femme pour célébrer toutes les disparues de la carte, toutes les assassinées sans laisser de traces, toutes les parties mutilées sans laisser d’adresse, les fugueuses de la planète mourante, les bouleversées des vies mortes-nées.
Les mille et une façons de tuer une femme
avant qu’elle ne le devienne, avant qu’elle ne soit forte et furie, avant qu’elle ne prenne le pouvoir, soit chef, avant qu’elle ne reprenne ses droits, ne change les lois, avant qu’en elle, en l’avenir, en l’humanité, en elle pour toujours, en elle sa foi explose.