|
mardi 17 décembre 2013 Témoignage Désaccord sur le virage de la Fédération des femmes du Québec
|
DANS LA MEME RUBRIQUE Manifeste du Front Féministe Confondre le sexe biologique et le genre nuit aux droits des femmes L’intersectionnalité : Les invectives grotesques et les procès d’intention ! Les mille et une façons de tuer une femme Pour un féminisme universaliste Fées cherchent Île Oasis L’universalisme est inhérent au féminisme Contre le racisme des bons sentiments qui livrent les femmes au patriarcat oriental Les filles, ne baissez pas les bras ! La Ville de Québec a dévoilé quatre plaques commémoratives en hommage à des femmes ayant marqué son histoire Qu’est-ce qu’une femme ? La sororité est-elle possible ? L’intersectionnalité dévoyée : le cheval de Troie des islamistes Le système patriarcal à la base des inégalités entre les sexes #8mars - Les "étincelles" de Sophie Grégoire Trudeau Désolée, vous n’êtes pas égales Élaine Audet et Micheline Carrier, récipiendaires du Prix PDF QUÉBEC 2016 Vous avez dit "mauvais genre" ? Lorraine Pagé trace un tableau de la situation des femmes dans le monde Sexisme politique, sexe social Révolution féministe : site féministe universaliste et laïc Il faut abolir les prisons pour femmes Le féminisme islamique est-il un pseudo-féminisme ? Pour un féminisme pluriel Cachez-moi ce vilain féminisme Féminisme - Le Groupe des treize veut rencontrer la ministre à la Condition féminine Lise Thériault Combattre le patriarcat pour la dignité des femmes et le salut du monde Martine Desjardins parle du Sommet des femmes à Montréal Banaliser la misogynie, c’est dangereux Féminisme - Faut-il faire le jeu du "Diviser pour régner" ? Je suis blanche et vous me le reprochez ! La pensée binaire du féminisme intersectionnel ne peut que mener à l’incohérence Lutter contre la pauvreté des femmes et la violence des hommes envers elles "Du pain et des roses" - Le 26 mai 1995, une grande aventure débutait Portrait des Québécoises en 2015 - L’égalité ? Mon œil ! Je plaide pour un féminisme qui n’essaie pas de s’édulcorer La Maison de Marthe, première récipiendaire du Prix PDF Québec Ensemble, réussir la 4ième Marche Mondiale des Femmes ! Tant que toutes les femmes ne seront pas libres, nous resterons en marche ! Des "Déchaînées" aux genoux du patriarcat ! L’intervention féministe intersectionnelle – Troquer un idéal pour une idéologie trompeuse ? Ce que révèle l’alliance de certains musulmans avec la droite réactionnaire Au cœur de la division du mouvement féministe québécois : deux visions Féminisme islamique - Quand la confusion politique ne profite pas au féminisme États généraux du féminisme - Des sujets importants écartés : "De qui ou de quoi avons-nous peur ?" PDF Québec est lancé ! - Une voix pour les droits des femmes États généraux et FFQ - Un féminisme accusateur source de dissension Ignorer et défendre la domination masculine : le piège de l’intersectionnalité Comment les hommes peuvent appuyer le féminisme Le féminisme contemporain dans la culture porno : ni le playboy de papa, ni le féminisme de maman Refuser d’être un homme. Pour en finir avec la virilité Les micro-identités et le "libre choix" érigé en système menacent les luttes féministes La misogynie n’a pas sa place dans le féminisme L’écriture équitable - La féminisation des textes est un acte politique Réfutation de mensonges au sujet d’Andrea Dworkin Une éducation féministe donne de meilleurs fils "Rien n’a encore pu me détruire" : entretien avec Catharine A. MacKinnon France - La mainmise des hommes sur le monde de la radio États généraux sur le féminisme au Québec/FFQ - Des exclusions fondées sur des motifs idéologiques et des faussetés Le mouvement des « droits des hommes », la CAFE et l’Université de Toronto Mensonges patriarcaux - Le mouvement des « droits des hommes » et sa misogynie sur nos campus Féministes, gare à la dépolitisation ! Les féminismes individualiste et postmoderne "Les femmes de droite", une oeuvre magistrale d’Andrea Dworkin "Je suis libre", une incantation magique censée nous libérer des structures oppressives Trans, queers et libéraux font annuler une conférence féministe radicale à Londres « Le féminisme ou la mort » "Des paradis vraiment bizarres" - "Reflets dans un œil d’homme ", un essai de Nancy Huston Quand les stéréotypes contrôlent nos sens "Agentivité sexuelle" et appropriation des stratégies sexistes Cessons de dire que les jeunes femmes ne s’identifient pas au féminisme ! Un grand moment de féminisme en milieu universitaire Beauté fatale. Les nouveaux visages d’une aliénation féminine Résistance au sexe en contexte hétérosexuel La CHI - Un humour dégradant et complice de l’injustice sociale "Heartbreak", une autobiographie d’Andrea Dworkin Hockey, suicide et construction sociale de la masculinité Polémique sur l’enseignement du genre dans les manuels scolaires en France Le "Gender" à l’américaine - Un verbiage qui noie la réalité du pouvoir patriarcal 2011-2015 - Un plan d’action pour un Québec égalitaire NousFemmes.org L’égalité inachevée Journée internationale des femmes 2011 - Briser le silence sur toutes les formes de sexisme En France et ailleurs, 2010, une mauvaise année pour les femmes Ce qu’est le féminisme radical Polygamie - Le Comité de réflexion sur la situation des femmes immigrées et “racisées” appuie l’avis du CSF Il y a trois ans, mon cher Léo... La Fédération des femmes du Québec représente-t-elle toutes les femmes ? Tout est rentable dans le corps des femmes... pour ceux qui l’exploitent Incessante tyrannie Comment le patriarcat et le capitalisme renforcent-ils conjointement l’oppression des femmes ? Égalité ou différence ? Le féminisme face à ses divisions Le "gender gap" dans les Technologies de l’information et de la communication La Marche mondiale des femmes dix ans plus tard Azilda Marchand : une Québécoise qui fut de tous les combats pour les femmes ! Les hommes proféministes : compagnons de route ou faux amis ? Prostitution et voile intégral – Sisyphe censuré par le réseau féministe NetFemmes Regard sur l’égalité entre les femmes et les hommes : où en sommes-nous au Québec ? Féminisme en ménopause ? Ce n’est pas la France des NOBELS ! Écarter d’excellentes candidates en médecine ? Inadmissible ! Trois mousquetaires au féminin : Susan B. Anthony, Elizabeth Cady Stanton et Matilda Joslyn Gage La question des privilèges - Le réalisateur Patric Jean répond à des critiques Lettre à Patric Jean, réalisateur de "La domination masculine", et à bien d’autres... Une grande féministe, Laurette Chrétien-Sloan, décédée en décembre 2009 Le travail, tant qu’il nous plaira ! Comme une odeur de misogynie La patineuse Invasion du sexisme dans un lycée public Magazines, anorgasmie et autres dysfonctions "Toutes et tous ensemble pour les droits des femmes !" Cent ans d’antiféminisme MLF : "Antoinette Fouque a un petit côté sectaire" Des femmes : Une histoire du MLF de 1968 à 2008 Qui est déconnectée ? Réponse à Nathalie Collard Manifeste du rassemblement pancanadien des jeunes féministes Pour une Charte des droits des femmes Andy Srougi perd sa poursuite en diffamation La lesbienne dans Le Deuxième Sexe Le livre noir de la condition des femmes La percée de la mouvance masculiniste en Occident Procès du féminisme Humanisme, pédocriminalité et résistance masculiniste Une critique des pages sur le viol du livre "Le Plaisir de tuer" Mise au point sur la suspension d’un article critiquant le livre du Dr Michel Dubec Pour éviter de se noyer dans la (troisième) vague : réflexions sur l’histoire et l’actualité du féminisme radical L’égalité des femmes au Québec, loin de la coupe aux lèvres ! Je suis féministe ! Écoféminisme et économie Poursuite contre Barbara Legault et la revue "À Bâbord !" - Mise à jour Biographie de Léo Thiers-Vidal Vivement le temps de prendre son temps ! Séances d’information pour le projet d’une Politique d’égalité à la Ville de Montréal Florence Montreynaud fait oeuvre d’amour et de mémoire Magazines pour filles, changement de ton ! Un 30e anniversaire de la JIF sous la fronde conservatrice L’égalité des femmes au Québec est-elle plus qu’une façade ? Colloque sur Antigone Prostitution et trafic sexuel - Dossier principal sur Sisyphe.org Golf : "Gentlemen only, ladies forbidden" ? Méchant ressac ou KIA raison ? Dégénération de "Mes aïeux", un engouement questionnant Les « Gender Studies », un gruyère confortable pour les universitaires Réflexions "scientifiques" du haut du Mont Grey Lock Madame, s’il vous plaît ! Annie Leclerc, philosophe Des arguments de poids... Pour hommes seulement Andrea Dworkin ne croit pas que tout rapport sexuel hétéro est un viol Peau d’Âme ou Beautés désespérées ? Réflexions et questionnement d’une féministe en mutation Mais pourquoi est-elle si méchante ? Le concours « Les Jeudis Seins » s’inscrit dans le phénomène de l’hypersexualisation sociale Aux femmes qui demandent - sans plus y croire - justice. Qu’elles vivent ! Jeux olympiques 2006 : félicitations, les filles ! 7e Grève mondiale des femmes - Le Venezuela donne l’exemple Évolution des droits des Québécoises et parcours d’une militante 2005, l’année de l’homme au Québec Mes "problèmes de sexe" chez le garagiste ! Brèves considérations autour des représentations contemporaines du corps OUI à la décriminalisation des personnes prostituées, NON à la décriminalisation de la prostitution "Femmes, le pouvoir impossible", un livre de Marie-Joseph Bertini L’AFEAS veut la représentation égalitaire à l’Assemblée nationale du Québec Elles sont jeunes... eux pas Dis-moi, « le genre », ça veut dire quoi ? Quand donc les hommes ont-ils renoncé à la parole ? Déconstruction du discours masculiniste sur la violence Les hommes vont mal. Ah bon ? La face visible d’un nouveau patriarcat Quelle alternative au patriarcat ? Le projet de loi du gouvernement Raffarin "relatif à la lutte contre les propos discriminatoires à caractère sexiste et homophobe" est indéfendable L’influence des groupes de pères séparés sur le droit de la famille en Australie Victoires incomplètes, avenir incertain : les enjeux du féminisme québécois Retrouver l’élan du féminisme Le droit d’éliminer les filles dans l’oeuf ? Des nouvelles des masculinistes Masculinisme et système de justice : du pleurnichage à l’intimidation Nouvelle donne féministe : de la résistance à la conquête Les masculinistes : s’ouvrir à leurs réalités et répondre à leurs besoins Nouvelles Questions féministes : "À contresens de l’égalité" S’assumer pour surmonter sa propre violence Sisyphe, que de rochers il faudra encore rouler ! Coupables...et fières de l’être ! Un rapport de Condition féminine Canada démasque un discours qui nie les inégalités de genre De la masculinité à l’anti-masculinisme : penser les rapports sociaux de sexe à partir d’une position sociale oppressive Les courants de pensée féministe Quelques commentaires sur la domination patriarcale Chroniques plurielles des luttes féministes au Québec Qu’il est difficile de partir ! Deux cents participantes au premier rassemblement québécois des jeunes féministes Le féminisme : comprendre, agir, changer Le féminisme, une fausse route ? Une lutte secondaire ? À l’ombre du Vaaag : retour sur le Point G L’identité masculine ne se construit pas contre l’autre Les hommes et le féminisme : intégrer la pensée féministe La misère au masculin Le Nobel de la paix 2003 à la juriste iranienne Shirin Ebadi Hommes en désarroi et déroutes de la raison Le « complot » féministe Christine de Pisan au coeur d’une querelle antiféministe avant la lettre Masculinisme et suicide chez les hommes Le féminisme, chèvre émissaire ! L’autonomie de la FFQ, véritable enjeu de l’élection à la présidence Les défis du féminisme d’aujourd’hui Les arguments du discours masculiniste Nouvelle présidente à la FFQ : changement de cap ? La stratégie masculiniste, une offensive contre le féminisme Le discours masculiniste dans les forums de discussion |
Comme militante féministe, je vis l’heure d’une rupture radicale avec la Fédération des femmes du Québec (FFQ) (1). Que je dise tout d’abord que la poursuite de mes combats féministes à l’intérieur de l’agenda de la FFQ était devenu conflictuel, tant pour mon identité politique que pour mes valeurs. Ce que j’entendais soulever avec d’autres lors des débats des États généraux du féminisme n’aura pas eu cours, compte tenu d’un dirigisme orchestré. Vaines attentes autour d’un événement clé venant confirmer que la FFQ est plus gouvernée par l’intelligentsia des lieux que par sa base. Ce que j’avais déjà dénoncé (2). Le colloque des 25-26 mai 2013 m’avait néanmoins éveillée à quelques espérances en lisant l’analyse critique d’une intelligentsia s’accusant de trop travailler en silo ! Un coup de force que ce virage évacuant toutes nos attentes, et ce, au détriment de la libre expression ! Ce qui venait en avant-plan : l’intersectionnalité. Une terminologie faisant référence aux théories des dernières décennies en lien avec les oppressions. Vu sous l’angle de l’intersectionnalité, le féminisme aura fort à faire pour éduquer à des volets d’oppression qui engagent à la lutte des classes. Pour l’instant, ce qui se laisse décrypter se traduit par les divisions entre « femmes blanches et/ou racisées » en regard de privilèges dont les femmes blanches sont tributaires. De plus, cette lutte fera intervenir la négation d’un projet social à travers le nationalisme, lequel trouve son cran d’arrêt par le colonialisme ou par un autre versant de l’intersectionnalité. Tout en disant que le débat des ÉG n’a pas eu cours, il y a lieu, bien sûr, de préciser tout ce qui renvoyait à un agenda mené au quart de tour, et ce dans l’influence de consignes dont je reparlerai. Mon implication au sein des États généraux Dès le début de l’année 2013, j’ai perçu l’année comme celle de mon divorce avec la FFQ. Le malaise était bel et bien omniprésent depuis le printemps 2008. Dans la dernière année, j’ai voulu m’intégrer à l’une des tables des ÉG. Il m’apparaissait dans l’ordre des choses de participer à la dynamique d’un moment charnière comme celui des États généraux du féminisme tout en ayant des attentes concernant ces débats pouvant porter sur charte – laïcité – culture – etc. Le contrôle se révèlera omniprésent dès la mise en place de l’infrastructure. Nous l’avons réalisé à travers ce qui se vivait dès le début de l’année, notamment par le rejet de deux femmes ayant proposé de siéger à des tables de travail des ÉG. On énonça brièvement les motifs du refus ainsi : « (…)nous avons aussi identifié des problèmes de fonctionnement dans un atelier sur l’intersection des oppressions. En effet, nous avons été témoins de propos racistes, de prises de paroles non respectueuses des diverses réalités des femmes et de pratiques anti-démocratiques menant à l’exclusion de certaines. Ces comportements doivent être évités. Le Comité d’orientation mettra en place les espaces nécessaires pour empêcher que cela arrive à nouveau. » (3) Quant à mon inscription, elle fut acceptée pour la Table 2. Certains noms faisaient partie de la liste de membres sans pour autant faire acte de présence. À rebours, je peux me demander s’il s’agissait de « potiches ». Dans le but de faciliter les discussions, nous avons travaillé les thématiques en sous-groupe. Après quelques mois, une tentative d’intimidation s’annonça envers deux membres du sous-groupe du thème conservatisme religieux. J’en étais. La rencontre fut annoncée par les autorités des ÉG comme une intervention de « mise au point ». Rapidement je pourrai constater être visée par quelques accusations. Sans oublier le ton que prenait SM pour s’adresser à moi. Une jeune fille autochtone a dit s’être sentie attaquée dans son identité quand j’ai fait la présentation de mes perceptions sur la religion et la spiritualité , tout en y ajoutant mes précisions liées aux symboles invoqués par cette même jeune femme (plumes et coloration du visage). Ce qu’elle avait présenté sous l’angle de signes pouvant être considérés ostentatoires. Il s’agissait d’une militante dans la jeune vingtaine de l’association Femmes autochtones du Québec (FAQ). Elle était manifestement contre l’interdiction des signes ostentatoires. Dans un autre ordre d’idée, il y avait accusation de harcèlement par rapport à l’envoi de nombreux fichiers informatisés liés au conservatisme religieux. Cette rencontre de « mise au point » avait pour but principal l’orientation du groupe vers l’idée d’un consensus. Après le préambule d’attaque, l’animatrice avisa d’une proposition gardée « sous buvard » jusqu’à la fin et qui, selon son dire, pouvait devenir proposition effective selon l’orientation qu’allaient prendre nos discussions. Cette proposition ne nous fut jamais dévoilée, mais il reste crédible d’imaginer que l’on avait sous la main une proposition décrétant l’expulsion d’une, voire de deux, membres de la Table 2. Cheminement et virage Il est bien connu que l’actuel débat sur la laïcité divise le mouvement des femmes alors qu’en 1966 le « nous femmes » affichait une position laïque consensuelle. On en retrouve l’esprit dans cet extrait : « Cette Fédération se caractérise par son caractère non confessionnel et multiethnique. La charte précise de plus que la Fédération n’aura pas d’aumônier. La signification de cette autonomie des femmes face au pouvoir religieux et au pouvoir national est cependant considérable, car c’est à cette condition qu’un discours féminin autonome pourra émerger. » (4) Par cet extrait, on voit que la FFQ se reconnaissait dans l’idée d’émancipation du système religieux, sans pour autant invoquer une quelconque menace par rapport à la liberté de pratique religieuse du sujet. Dans le contexte évolutif, quelques années plus tard, la FFQ prouvera à nouveau la poursuite d’une vision féministe qui se reconnaît dans le projet social. À cet effet, quelques extraits d’un mémoire : « Au-delà du statut constitutionnel du Québec, c’est le projet social et politique qui nous intéresse. Nous considérons qu’il n’est pas possible d’élaborer un projet politique sans projet social, et qu’un tel projet social doit inclure le projet féministe (…) Or, nous croyons que la marge de manœuvre quant à l’inscription de changements importants dans l’organisation sociale et politique du Québec sera proportionnelle au degré d’autonomie que le Québec se donnera. Et nous croyons qu’une plus grande marge de manœuvre pour le Québec favoriserait l’éclosion d’un projet féministe de société, à condition que les femmes soient étroitement associées à toutes les phases de l’élaboration de ce projet. Pour définir et mettre en œuvre un projet de société, nous avons besoin d’un cadre qui nous appartienne. » (5) Par ces extraits, j’ai voulu faire apparaître la rupture qu’opèrent les propositions adoptées par les États généraux de novembre 2013. À travers la plate-forme politique et la vision du nationalisme qui s’est infiltrée par le biais de l’intersectionnalité, on peut facilement convenir du virage par rapport à l’énoncé de 1990 qui projetait de « favoriser l’éclosion d’un projet féministe de société ». Une chose est certaine, si un débat ramenait en avant-plan l’idée d’un tel projet féministe, il y aurait dichotomie entre la base et les propositions que sous-tendent les États généraux du féminisme de novembre 2013. Cela dit en précisant qu’il y a volonté, tant par les textes que par le discours, de faire illusion sur le pouvoir de la base concernant la laïcité. En témoigne un petit « livret » (édité en mai 2013) et traitant de laïcité, lequel est repérable au sein du document intitulé « La laïcité » : « L’engagement pour la laicité est inscrit dans la plateforme politique de la FFQ depuis 2003. Il y est toujours et, à moins que le congrès n’en décide autrement, il y restera. » (6) Or, cette réalité n’étant pas de l’agenda des États généraux de 2013, on ne pouvait inviter la base à revenir sur le sujet. Au lendemain des ÉG, Alexa Conradi, présidente de la FFQ, répondait à une journaliste l’interrogeant sur les discussions qui avaient été discutées concernant la charte et la laïcité. Sa réponse était trompeuse. En réalité, ce n’était pas par « désintérêt », comme elle l’insinuait, qu’il n’avait été question de la charte, mais plutôt à cause du contrôle exercé par le comité « agenda et consignes ». Voici quelques consignes qui accompagnaient le Cahier du Forum des États généraux sous le titre « Engagement réciproque des participantes » : Extraits : . « Pour un climat de confiance, respectueux et solidaire : (page 2) . Les organisatrices s’engagent à nourrir activement un climat sain, à veiller au respect de chaque participante et de chaque groupe, à fournir les ressources nécessaires pour accompagner les participantes souhaitant résoudre un conflit et à intervenir pour faire cesser une situation ne respectant pas le présent engagement. C’est pourquoi nous avons mis sur pied une Équipe de soutien et de médiation (…). Équipe de soutien (page 3) (…) . Cette équipe interviendra à la demande d’une ou de plusieurs participantes, d’une animatrice ou d’une membre de l’équipe des États généraux. Ainsi, toute participante ou animatrice qui le juge pertinent peut faire appel à cette équipe pour intervenir dans une situation jugée problématique. . Les animatrices doivent elles-mêmes intervenir dans le cadre de l’animation de leur atelier et pourront alors se référer au présent engagement réciproque des participantes pour rétablir un climat respectueux et sain. De même, chaque participante pourra, si elle en ressent la nécessité, se référer au présent engagement réciproque pour intervenir dans une situation de non-respect ou d’oppression. » Extraits du Cahier du Forum des ÉG - J’ai choisi quelques propositions touchant le projet social : Page 82 – Pistes d’action – Section 7 – (propositions adoptées) . Développer des visions alternatives pour apporter de nouvelles perspectives au débat actuel sur les enjeux de l’identité nationale et du nationalisme ; . Se donner les moyens de développer des réflexions et des positions féministes sur ces questions, de manière à construire un Québec qui reconnaît et travaille activement à contrer les rapports de domination concernant les personnes perçues comme venant d’ailleurs ou ayant des appartenances culturelles différentes (langue, histoire, héritage religieux) de celles de la majorité ; . Prendre connaissance de l’analyse féministe anticoloniale et postcoloniale afin de mieux réfléchir à la situation actuelle du Québec, de déployer une approche féministe « décolonisée » ou anticoloniale et de développer un nouveau langage plus adapté aux réflexions et préoccupations féministes dans ces débats. . Développer un discours critique sur le nationalisme ethnique ou identitaire ; . Porter un regard critique et dénoncer les discours qui tendent à indiquer que les immigrants ou les personnes racisées seraient porteuses de valeurs rétrogrades notamment sur le plan de l’égalité entre les femmes et les hommes, laissant sous-entendre que le Québec en serait exempt d’inégalités dans les rapports sociaux de sexe. Féminisme - Éducation - Projet social J’ai eu le bénéfice d’un atelier sur l’intersectionnalité et je n’exagère aucunement en disant que le sujet est complexe. J’estime qu’il y a précipitation de la FFQ, voire même débordement quant aux différents mandats qu’elle se donne à travers l’intersectionnalité. L’ensemble de la société étant concernée, le féminisme ne saurait implanter de telles réformes sans avoir l’assurance de leur recevabilité par l’ensemble de la société à travers un projet social. Pour la professeure Micheline De Sève, la question de l’intersectionnalité fait figure de « Cheval de Troie » (7) eu égard à l’abandon des luttes du féminisme basées sur le concept de « genre », tout en divisant les femmes. Cette perception est juste si l’on s’arrête à ce qui s’introduit – au premier degré – à savoir la notion de privilèges entre femmes blanches et femmes « racisées ». Une semaine avant le forum des ÉG, Le Devoir a présenté un Cahier portant sur l’ensemble des idéologies qu’allait introduire cet événement. Il fut évidemment question d’intersectionnalité. Selon les théories énoncées par quelques auteures dans le cahier du Devoir, on avait l’impression que la FFQ invitait à un large débat alors que, dans les faits, il s’agissait d’un « forum » sous contrôle.. (8) Amenée par une membre de l’intelligentsia, l’information servait l’image de la FFQ tout en renvoyant à une coupable. Et pourtant, à travers les faits, il y a lieu d’identifier les faces cachées d’un moment inattendu, puisqu’une femme de la base s’était autorisée à une opinion dérangeante par rapport à la culture du « bon ententisme ». Ce pourrait être l’indice d’une démarche de la base vers plus de liberté d’expression ! Toujours dans ce même cahier du Devoir, je me suis interrogée sur les avancées de Micheline Dumont. (9) La réponse m’est venue d’une politologue rattachée à l’Université Laval et qui renvoie Madame Dumont à un autre levier de réflexion : « La FFQ est-elle en train de bifurquer de son mandat ? A-t-elle déjà fait le choix de laisser de côté certaines femmes, blanches, de classe moyenne, hétérosexuelles, procharte ? Finalement, n’est-on pas en droit de se demander qui instrumentalise une cause à des fins partisanes ? Qui divise les féministes et qui n’est pas solidaire ? Ces contradictions posent les questions de l’indépendance de la FFQ et par le fait même de sa représentativité dans la conjoncture actuelle. » (10) De par sa chronique régulière sur le site Sisyphe portant sur « Laïcité, femme et religion », Me Julie Latour s’adressait directement à Micheline Dumont en l’incitant à reconnaître que « Mieux vaut exclure le voile de certaines fonctionnaires que de remettre en cause l’égalité de toutes les femmes. Le bien commun a encore droit de cité face aux revendications individuelles. » (11) Je reconnais ma double appartenance au féminisme et à la société civile. Dans l’un et l’autre cas, mon engagement tient aux valeurs véhiculées. Ce texte a permis de témoigner des raisons de mon désengagement par rapport à l’agenda politique de la FFQ. Notes 1. « Les États généraux du féminisme », blogue En Bref…, le 17 nov. 2013 Mis en ligne sur Sisyphe, le 15 décembre 2013 |